Chroniques

par katy oberlé

Macbet | Macbeth
opéra de Giuseppe Verdi

Festival Verdi / Teatro Giuseppe Verdi, Busseto
- 4 octobre 2025
Un fort beau MACBET à Busseto, dans le cadre du Festival Verdi 2025...
© roberto ricci

Sous les ors miniatures du Teatro Giuseppe Verdi de Busseto, modeste commune où le jeune compositeur rêvait peut-être d’opéra, l’édition 2025 du Festival Verdi de Parme rend hommage à Shakespeare avec ce Macbet (représenté dans la version de 1847) qui se concentre entièrement dans le vertige dramatique. Petite salle pour grande tragédie, l’équation fonctionne à merveille, ce soir où nous retrouvons avec joie ce rendez-vous italien.

Cette année, le Teatro Regio de Parme a choisi de revisiter les liens du compositeur avec le dramaturge anglais. Macbeth, Othello et Sir John – ce dernier via une production déjà un peu ancienne [lire notre chronique de Falstaff] – illustrent ici trois faces d’une même fascination, de la fureur à la dérision. À Busseto sonne le Verdi des commencements, celui qui découvre Shakespeare et tente d’en saisir la démesure avec les outils du jeune romantisme italien. Le choix de la version originale de 1847, bien avant les retouches parisiennes de 1865, restitue cette première tension à travers des rythmes martelés, ses cabalettes caractéristiques, son énergie brute aux visions hallucinées.

Sobre et lisible, la mise en scène de Manuel Renga inscrit l’argument dans une atmosphère franchement claustrophobe. Quelques voiles noirs, des lumières d’Emanuele Agliati qui sculptent les visages et un décor modulable signé Aurelio Colombo font naître une Écosse de ténèbres. Dans cette immersion sensible, la production joue de la proximité du lieu, soit un théâtre-bijou d’à peine trois cents places où chaque geste prend sens de confidence intime et où menace chaque silence. La folie shakespearoverdienne y gagne un impact terrible !

En fosse, Francesco Lanzillotta électrise l’Orchestra Giovanile Italiana. Sa direction vive, nerveuse, éclaire la pâte orchestrale sans la durcir. Il y a dans ses tempi quelque chose de la fébrilité de Macbeth lui-même, conduisant à une marche vers l’abîme [lire nos chronqiues de Torvaldo e Dorliska, Lucia di Lammermoor, L’elisir d’amore, Aida, La bohème, Bastarda et La rondine]. Le Coro del Teatro Regio di Parma, préparé par Martino Faggiani, impressionne par sa cohésion et sa diction mordante – les sorcières n’y psalmodient pas : elles prophétisent.

Le baryton Vito Priante campe un Macbeth humain et jamais monolithique. Il est hanté, rongé de doutes, complètement instable [lire nos chroniques de Don Giovanni, Berenice, Motezuma, Il Flaminio, Les contes d’Hoffmann, Iolanta, L’ange de Nisida, Il califo di Bagdad, Capriccio, Il viaggio a Reims et La traviata]. Face à lui, Maria Cristina Bellantuono fait figure de découverte, qui aborde Lady Macbeth avec une intensité vocale préférant la couleur à la puissance. Cette prise de rôle trouve un relief dramatique notable. Le Banco d’Adolfo Corrado impose une ligne noble [lire nos chroniques d’Alfredo il Grande et de La Cenerentola], tandis que Matteo Roma donne à Macduff un grand élan héroïque [lire nos chroniques de Moïse et Pharaon et d’Eduardo e Cristina].

Verdi retrouve à Busseto son ombre tutélaire, celle d’un poète qui, du Macbeth de jeunesse à l’Otello de la maturité et au Falstaff du sourire, l’a inspiré toute sa vie durant, jusqu’à un projet de mettre en musique King Lear, malheureusement jamais réalisé.

KO