Chroniques

par irma foletti

Gioachino Rossini | Le nozze di Teti e di Peleo
Eleonora Bellocci, Leonor Bonilla, Marina Comparato, Mert Süngü, etc.

Górecki Chamber Choir et Virtuosi Brunensis dirigés par Pietro Rizzo
Rossini in Wildbad / Trinkhalle, Bad Wildbad
- 26 juillet 2018
Pietro Rizzo joue la cantate de Rossini, Le nozze di Teti e di Peleo (1816)
© andreas heideker

Œuvre de circonstance composée par Rossini en 1816, au début de sa période napolitaine, pour célébrer les noces de Marie-Caroline et du Duc de Berry, Le nozze di Teti e di Peleo fait partie des cantates dites pour les Bourbons, une allégorie à la gloire du pouvoir régnant, convoquant diverses divinités, comme Jupiter et Junon.

Pour qui découvre la salle tout en longueur de la Trinkhalle, la première impression est plutôt favorable. Une acoustique puissante met bien en valeur les chanteurs solistes et choristes placés sur le podium. L'orchestre ne bénéficie pas de fosse, mais le chef réalise un bon équilibre entre voix et instruments. Les musiciens des Virtuosi Brunensis sont appliqués et bien coordonnés, Pietro Rizzo délivrant une direction vivante mais prudente avec les tempi, diminuant ainsi la vélocité de quelques mesures jouées par la clarinette solo ou les cors que l’on sent un peu à la limite, tandis que la flûte traversière paraît plus sûre.

Parmi les cinq solistes de ce concert, le soprano Leonor Bonilla (Cerere) est une formidable révélation : beau timbre d'une grande tendresse dans les passages doux, voix homogène et suffisamment puissante, aux suraigus complètement assurés, même si le registre grave est plus limité et certainement moins développé que celui de la créatrice du rôle, la célèbre Isabella Colbran. Elle doit affronter, en particulier, le morceau de choix de la soirée, le long air Ah non potrian resistere, issu directement du Cessa di più resistere chanté par le comte Almaviva quasiment au final du Barbiere di Siviglia. Extrêmement rapide, elle vocalise à la perfection, les suraigus piqués sont d'une précision redoutable et elle se permet même quelques menues variations ; bref, un nom à retenir ! L'autre soprano, Eleonora Bellocci (Teti), est issue de l'Akademie BelCanto et peut se prévaloir d'une musicalité sans failles, même si la voix, plutôt pointue et acide, séduit nettement moins. Le mezzo Marina Comparato (Giunone) propose, quant à elle, un timbre plus charnu, mais le rôle est très réduit, principalement à son duo d'entrée avec Cerere où les deux voix sont joliment assorties, et au quintette final [lire nos chroniques d’Armida al campo d’Egitto, Adriano in Siria, Antigona et Orlando finto pazzo].

Mert Süngü (Peleo) est un ténor fort étendu, d'un grave superbement exprimé jusqu'à un aigu vaillant, claironné parfois avec vigueur [lire notre chronique du 16 août 2012]. Il varie aussi les nuances en osant de beaux passages en mezza voce, mais on entend une légère hésitation d'intonation sur l'attaque de quelques rares notes. L'annonce faite de son indisposition avant le début de la soirée explique sans doute ces petites imperfections. L'autre ténor, Joshua Stewart (Giove), n'atteint malheureusement pas ce niveau, le grave est très consistant (à se demander, d'ailleurs, s'il ne s'agirait pas d'un baryton), mais l'instrument ne projette pas dans le medium et l'aigu, la voix de couleur voilée semble coincée dans la gorge.

Les artistes du Górecki Chamber Choir chantent avec sérieux et enthousiasme, sinon un parfait fondu suivant les pupitres – les ténors, en particulier, manquent d'homogénéité. Les applaudissements nourris du public motivent les artistes à bisser le quintette final. Il est à noter, enfin, que ce concert a été enregistré sur le vif et que le CD devrait être disponible dans quelques mois.

IF