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Chroniques
Max Reger
œuvres pour chœur (vol.1)
« Catholique jusqu'au bout des doigts » selon ses propres termes, Max Reger (1873-1916) va pourtant tourner le dos à sa religion par étapes successives : amitié indéfectible avec l'organiste Karl Straube, mariage avec Elsa von Bercken – protestante et divorcée –, et enfin son arrivée comme professeur au Conservatoire de Leipzig, en 1907. Le contact amorcé avec la musique de chœur protestante, dès son plus jeune âge, s'accentue alors. Il compose des chorals et des « chants sacrés ». Quelques engagements épisodiques comme chef de chœur finissent de le mettre au plus près d'une expression artistique et religieuse qui l'accompagnera longtemps.
Les Acht Geistliche Gesänge (Huit Chants Sacrés) Op.138 furent trouvés au chevet de Reger mourant, sous forme d'épreuves non corrigées. Leur composition a commencé peu après la déclaration de guerre, pour se détendre de l'écriture de l'Ouverture patriotique Op.140 (à l'époque, Reger est d'ailleurs soigné pour surmenage). Comme pour les Douze lieder sacrés de l'opus précédent, les textes utilisés proviennent du psautier allemand rassemblé par Will Vesper (1882-1962). Cette composition pour quatre à huit voix, avec parfois un recours à des tournures archaïsantes, se veut résolument sobre, en opposition avec les œuvres précédentes.
Avant cette œuvre testament, Drei Motetten (Trois Motets) Op.110 convoquent un chœur mixte de sept à huit voix. Mein Odem ist schwach (Mon souffle est faible), d'après un texte du livre de Job, est créé le 13 novembre 1909 par le Chœur de Saint-Thomas auquel il est dédié. La double fugue finale, qui commence au moment où le narrateur sait son Sauveur bien vivant, rappelle les recherches passées du jeune Reger, et témoigne de l'influence de Bach sur la musique de l'époque. Ach, Herr, strafe mich nicht (Ah, Seigneur, ne me punis pas) emprunte son texte à différents psaumes. Sa complexité (un grand segment contrapuntique, de nouveau une double fugue finale) en ont retardé la création jusqu'en juin 1914. Sur un texte de l'Ecclésiaste, O Tod, wie bitter bist du (O mort, que tu es amère) se veut plus simple, et « terriblement triste avec une fin transfigurante » ; le motet est créé le 10 novembre 1912, à la mémoire de Lili Wach, la plus jeune des filles de Felix Mendelssohn, disparue en cours d'année.
Un second enregistrement nous ramène bizarrement au tournant du siècle, quand Reger, pratiquement détruit par l'alcool, les dettes et un service militaire épuisant, reprend goût au travail chez ses parents, à Weiden [lire notre critique du CD].
SM