Chroniques

par hervé könig

Heinrich Ignaz Biber
Missa Christi resurgentis

1 SACD Harmonia Mundi (2005)
HMU 807397
Heinrich Ignaz Biber | Missa Christi resurgentis

C'est en l'hiver 1670 qu’Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704), ayant abandonné son poste à la Cour de Moravie, puis de Kremsier (aujourd'hui Kroměříž, en territoire tchèque), entre au service du Prince-archevêque Maximilien Gandolph von Khuenberg. Dans cette Salzbourg baroque aux églises richement ornées, d'abord simple serviteur, le jeune violoniste gravit les échelons de la notoriété, passant de Vice-maître en 1679 à Maître de chapelle en 1684 ; six ans plus tard, il sera fait chevalier par Léopold Ier, à Vienne. De fait, même si elle est souvent moins connue que les sonates pour son instrument favori, la musique vocale sacrée tient une grande place dans sa production ; elle comprend quelques huit Messes, deuxRequiem, un Stabat Mater ainsi que des Vêpres et des Offertoires.

Le nom de cette Messe du Christ Ressuscité (Missa Christi resurgentis) nous était connu, mais il fallut de longues heures de travail en bibliothèque au Dr. James Clemens, à déchiffrer des bribes de papier, pour en retrouver les notes, trois cents ans après la mort de son créateur. L'œuvre a probablement été composée pour les fêtes de Pâques de 1674, et jouée selon le procédé de l'antienne (petits groupes dialoguant) – les deux chœurs à quatre voix, par exemple, comportent de nombreux passages en répons, tandis que cordes et cuivres s'affrontent lorsqu'ils ne s'unissent pas. Duos de violons, de trompettes ou de cornets à bouquin (cornetti) ponctuent les différents mouvements de cette célébration pleine d'entrain, où les morceaux chantés alternent avec des sonates – composées entre 1662 et 1682. Si on a souvent parlé de Biber comme d'un génial prédécesseur de Bach, ces pages instrumentales doivent beaucoup à l'influence du Viennois Johann Heinrich Schmelzer, lui-même sensible aux découvertes de confrères italiens.

Élève de Simon Standage et Marie Leonhardt, Andrew Manze est certes violoniste – il sonne un Cremona des dernières années du XVIIe siècle –, mais aussi enseignant, chroniqueur de presse et de radio, et, en juillet 2003, a succédé à Trevor Pinnock à la tête deThe English Concert, l'ensemble que celui-ci avait fondé trente ans plus tôt. Il signe ici une lecture brillante qui profite intelligemment de l'emphase baroque de l'écriture de Biber. On saluera le grand équilibre auquel parvient le Choir of The English Concert, tant dans les tutti que dans les échanges solistes, idéalement maîtrisés.

HK