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Chroniques
Gustav Mahler | Symphonie en ut # mineur n°5
David Robertson dirige l’Orchestre national de Lyon
Changements et continuités à l’Orchestre national de Lyon : changements car la saison annoncée rompt avec les cycles thématiques auxquels nous avaient habitués David Robertson, mais la continuité de sa politique d’ouverture est assurée par des programmes mettant largement en valeur les musiciens avec un certain éclectisme dans le choix des œuvres, privilégiant la découverte et la surprise.
Continuité, également, quant au choix de la pièce présentée lors du concert d’ouverture : si la saison dernière nous avions pu entendre la Symphonie en ut mineur « Résurrection » et la Première de Gustav Mahler [lire notre chronique du 12 avril 2003], c’est la célébrissime Cinquième qui est présentée ce soir.
On a longtemps pris l’habitude de caractériser l’œuvre de Mahler par des éléments de sa biographie, et l’on ne peut s’empêcher de citer à nouveau pour cette œuvre le cadeau fait à sa future femme Alma qui deviendra le plus connu des mouvements de la symphonie : l’Adagietto pour cordes.
La Symphonie en ut # mineur n°5 s’organise en trois parties bien distinctes, chacune avec ses propres thèmes et sa propre identité. Elle débute par une longue marche, militaire pour les uns (le jeune Mahler fut marqué par les défilés de son enfance) quoiqu’indiqué « comme un procession funèbre » sur la partition. Sa lourdeur statique n’a, en effet, rien d’héroïque, et David Robertson le respecte bien, tempo très lent, atmosphère morne et pesante faisant tout de même ressurgir toute la violence des interjections de trompettes et de cors. L’exploration des thèmes énoncés se poursuit dans le second mouvement, plus animé, orageux, et c’est ici, après le premier épisode qui saisit au vif, qu’on se rend compte de la grande forme de l’orchestre et de la clarté de la direction.
La seconde partie s’ouvre dans un rayon de soleil qui prend le contre-pied de l’épisode précèdent au ciel chargé de nuages. L’appel du cor lance avec éclat le Scherzo exubérant, arborant tour à tour la forme d’un trio ou d’une valse, rondement mené par un Robertson qui insuffle rythme et énergie à volonté, faisant ressortir tous les trésors polyphoniques de l’orchestration mahlérienne.
Brisant à nouveau l’ambiance, la dernière partie débute avec le célèbre Adagietto (sublimé par Visconti dans Mort à Venise). Exclusivement interprété par les cordes, souvent à l’unisson au sein des pupitres, ce passage lent et calme peut s’avérer terrible pour les musiciens. Mais l’homogénéité, la justesse et la musicalité des Lyonnais lui rendent toute la langueur et la sensualité qu’il appelle. Puis, triomphalement, la course folle du Rondo final achève d’exhiber l’exhalation du chef et de ses musiciens dans une ovation générale et tonitruante, largement méritée, tant la soirée fut riche en émotion.
LL