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Chroniques
Benvenuto Cellini
opéra d’Hector Berlioz (version de concert)
La formation parisienne poursuit son vaste cycle Berlioz l’opéra Benvenuto Cellini, donné en version de concert. On n’a pas si souvent l’occasion d’entendre l’œuvre lyrique du compositeur français, si ce n’est la toujours très présente Damnation de Faust, pourtant non destinée à la scène, qui bénéficie des grâces programmatiques.
La distribution de ce soir se révèle assez inégale.
Balducci, le père de la belle, est chanté par Vincent Le Texier qui semble beaucoup s’amuser au contact de ce personnage qu’il bouffe quelque peu. Il use d’une diction exemplaire, aucun phonème ne se trouvant livré au hasard. Notons une projection soignée. Le ténor Hugh Smith campe un Cellini jobastre, se passant parfaitement de mise en scène. Vocalement, si la phrase est plutôt jolie en général, elle souffre de quelques étrangetés dans l’aigu, systématiquement baillé, en arrière, voilé. L’effet de notes hautes placées pianissimo est par endroit louable, mais encore lui manque-t-il une technique plus sûre. Il reste un sympathique Cellini, quoiqu’accusant une tendance à retenir la battue gênante dans les ensembles.
On est conquis par l’Ascanio prodigieusement sonore d’Isabelle Cals. Le timbre est puissant et attachant, le chant mené avec constance et sécurité, la technique solide. La belle Teresa, qui fait tourner les têtes, est Annick Massis dont on admire une nouvelle fois les grands moyens. Cela dit, son chant est infiniment maniéré. C’est assez problématique, car si d’une part la vocalise finale de la cavatine est indéniablement parfaite, la diction est par ailleurs affreusement empruntée, surconsonnantique, et la phrase minaude volontiers. Constatons également un réel souci sur les attaques, souvent différés par une sorte de passage en creux où la vibration meurt dans l’œuf et nécessite un regain d’effort, ce qui donne nettement l’impression d’être obligé de s’y reprendre à deux fois (particulièrement flagrant sur la prière du II).
Convainc également Nicolas Testé qu’on aimerait entendre dans un rôle plus conséquent que le succinct Bernardino. Enfin, Philippe Duminy propose un Fieramosca d’un impact frappant, concentré, parfois terrible, toujours déterminé ; un chant d’une grande franchise, sans esbroufe, qui va droit au but. Mais Isabelle Cals et lui sont bien les seuls à chanter dans le style, ouvrant souplement la phrase sans mordre inconsidérément chaque mot. Certains trouveront cela quelque peu vieux style (certes, il serait plutôt rassurant qu’on ne chantât pas Lully comme Strauss, par exemple), mais c’est pourtant, dans une certaine mesure, assumer loyalement la transmission qui leur est confiée.
Christoph Eschenbach affirme une grande aisance à diriger cette musique.
Sa lecture de Benvenuto Cellini s’avère d’une grande intelligibilité, contrastée et précise. On regrette quelques désagréments dus au Chœur de l’Armée Française, apparemment mal préparé, qui accuse de grosses difficultés articulatoires, mais surtout se fourvoie dans de nombreux décalages rythmiques.
BB