Chroniques

par laurent bergnach

Giovanni Battista Pergolesi
L’olimpiade | L’olympiade

2 DVD Arthaus Musik (2013)
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Alessandro de Marchi  joue L'olimpiade (1735), un ouvrage de Pergolesi

Célèbre pour son ouvrage de fin d'étude au conservatoire de Naples, La conversione e morte di San Guglielmo (1731), Giovanni Battista Pergolesi (1710-1736) honore rapidement ses premières commandes d’opéra, dans le domaine seria – lire nos critiques des DVD Salustia (1732), Il prigionier’ superbo (1733), Adriano in Siria (1734) – aussi bien que buffaLo frate ’nnamorato (1732), Il Flaminio (1735), etc.

Quelque temps avant son décès de la tuberculose, le natif de Jesi suit à Rome son mécène, le comte Marzio Maddaloni Carafa. Le Teatro Tordinona profite de sa présence pour lui demander un ouvrage lyrique, L’olimpiade, créé au début de janvier 1735. La situation financière du théâtre est précaire (absence de chœur, chanteurs et décors de second choix) et très court le temps alloué. Pergolèse compose à partir d’un livret déjà connu de Métastase, conçu à l’origine pour Caldara (1733), et que choisiraient encore, après lui, Leo (1737), Galuppi (1747), Hasse (1756), Jommelli (1761), Traetta (1767), Cimarosa (1784), Paisiello (1786), etc. Le succès de ce livret, qui prend pour cadre un rituel connu de la Grèce antique, repose sur l’impact immédiat des affects en ne renonçant à aucun expédient (méprise, dilemme, tentative de suicide et d’attentat). Comme l’écrit Francesco Cotticelli dans la notice :

« l’issue des jeux sera pour chacun synonyme soit d’un avenir brillant soit d’un sombre désespoir. L’amour et la haine, la paix et l’intimité, tout tourne autour d’un seul moment décisif. Il en va de même pour les hommes et pour les femmes, pour les monarques et pour les royaumes. Disposons-nous d’autre chose que la vertu et la noble contemplation quand il s’agit de faire face à notre finitude temporelle ? »

En 2011, dans le cadre intime du Teatro Valeria Moriconi (Jesi), Italo Nunziata pose deux allées en croix au centre de l’auditorium, que parcourent des personnages en souffrance, et profite des galeries alentour. Quelques figurants et objets (grilles, miroir) participent aux multiples rapprochements et séparations de l’intrigue – l’essentiel étant porté par des chanteurs « à nu », au cœur du public. Alessandro De Marchi occupe la scène proprement dite, attentif à nuancer la grande énergie de son Academia Montis Regalis.

Hors les fréquents dérapages d’Yetzabel Arias Fernández (Argene) et le manque de légèreté de Raúl Giménez (Clistene) à la voix enveloppante, on trouve ici une équipe vocale irréprochable. Les attaques douces de l’onctueuse Lioubov Petrova (Aristea) séduisent, soprano qui partage la stabilité et la précision de Sofia Soloviy (Megacle) [lire notre critique du CD L’incoronazione di Dario] et le ténor Antonio Lozano (Aminta) [lire notre critique du DVD La Didone]. Enfin, on apprécie la gestion du souffle de Milena Storti (Alcandro) dont les graves sont généreux, ainsi que la couleur, l’aisance et l’expressivité de Jennifer Rivera (Licida), qui subliment l’air ultime de l’Acte II, Gemo in un punto e fremo.

LB