Chroniques

par gilles charlassier

Rinaldo Alessandrini dirige le Concerto italiano
Magnificat RV 611, Concerto n°2 RV 563, Gloria RV 589

Venise Vivaldi Versailles / Château de Versailles, Chapelle royale
- 2 juillet 2011
Magnificat et Gloria, Vivaldi par Rinaldo Alessandrini
© guido reni

Pas plus que dans la lagune, Vivaldi n’officia dans la Chapelle royale où se tient le deuxième doublet offert par le Concerto italiano et Rinaldo Alessandrini. Comme un pendant au programme instrumental de la veille [lire notre chronique], celui de ce soir met en avant deux des plus célèbres pages de musique religieuse du Prêtre roux.

Contrairement à son homonyme de la main de Bach, le Magnificat RV 611 commence par un chœur empreint de chromatismes. L’affirmation confiante de la foi n’intervient que dans Exultavit spiritus meus, confié au mezzo-soprano. Romina Basso s’y montre plus naturelle que dans les pages introverties. L’alternance de numéros confiés au chœur et d’autres dévolus aux solistes se superpose à celle des modalités, dans une esthétique descriptive fidèle à la succession des inflexions du texte sacré. On retiendra le beau duetto pour soprano et mezzo-soprano, avec violoncelle et hautbois concertants, ou encore la fugue finale du Gloria Patri, couronnant l’ouvrage dans une polyphonie à l’image de la magnificence du Seigneur. En guise d’intermède, le Concerto pour trompette, hautbois et orchestre n°2 RV 563 démontre que l’usage d’instruments d’époque ne condamne pas à l’imprécision. Le cuivre a une rutilance quelque peu rêche, non dénuée de séduction, tandis que le mouvement lent central offre une tribune au hautbois et à la souplesse de son phrasé.

Le Gloria RV 589 est, à juste titre, une des pages les plus célèbres du compositeur. Le chœur initial fait rugir les basses et révèle la solidité du continuo du Concerto italiano. Le très bel Et in terra pax est remarquablement mis en place, avec un soin délicat apporté à la texture orchestrale qui fait pendant au diaphane partenaire choral. Par contraste, le Laudamus te est entonné avec une nervosité toute théâtrale par Raffaella Milanesi (soprano) et Romina Basso. L’aria (pour soprano) Domine Deus, est l’une des plus belles pages de l’ouvrage – ce qu’une spectatrice n’a peut-être pas supporté. Le hautbois conduit un motif pastoral que le violoncelle soutient. Roberta Invernizzi ne se laisse point perturber et arbore une fraîcheur et une clarté idéales, portées par une musicalité certaine.

Avec le Domine Fui, on descend des éthers vers une vigueur nettement plus terrienne. Le Domine Deus bénéficie de la couleur discrète de l’orgue, mais également d’une dramatisation un rien excessive du mezzo, tout en mettant en avant la longueur admirable de son souffle ainsi que la tenue de la ligne. Le thème de l’ouverture revient dans le Quoniam tu solus sanctus avant le Cum sanctu spiritu dans lequel la texture s’allège vers les hauteurs en direction desquelles l’âme regarde s’envoler l’Esprit Saint. Nonobstant quelques décalages du côté masculin, l’ensemble vocal Akadêmia réalise un beau travail sous l’égide de Françoise Lasserre.

En guise de bis, le Gloria initial est redonné avec encore plus de vigueur, n’étant plus freiné par sa position inaugurale dans la composition.

GC