Chroniques

par bertrand bolognesi

Annelien van Wauwe et Stefanos Spanopoulos
œuvres de Debussy, Saint-Saëns, Salonen et Weinberg

Festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon / Corum
- 24 juillet 2014
le jeune clarinettiste belge Annelien van Wauwe en récital à Montpellier
© dr

Deux rendez-vous chambristes viennent brillamment conclure notre séjour montpelliérain. Tout d’abord à l’heure du déjeuner, où la clarinettiste belge Annelien van Wauwe est l’invitée de la série Jeunes solistes – oui, ne l’oublions pas, c’est aussi une mission que s’est donné dès ses premiers pas le Festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon : offrir carte blanche aux musiciens en début de carrière. Annelien van Wauwe a étudié la clarinette dès l’âge de huit ans, dans son pays natal, puis est allée perfectionner son art à Lübeck, à Paris, Rome et Berlin. De nombreux prix internationaux l’ont ensuite distinguée.

On retrouve la musique de Claude Debussy, décidément très présente dans cette édition du festival, avec la Rhapsodie pour clarinette et piano en si bémol majeur n°1 de 1910 (dont on connaît un peu plus la version orchestrée un an plus tard). Dès l’abord, le son moelleux et généreusement nourri que Stefanos Spanopoulos ménage au piano crée une aura bien venue, quoique l’instrument se révèle assez mal réglé. Il n’empêche, Stanopoulos est caressant, laissant danser la dynamique particulièrement inventive d’Annelien van Wauwe. Le talent de l’interprète se révèle plus encore dans la Sonate en si bémol majeur Op.167 qu’écrivit Camille Saint-Saëns au printemps 1921, dont la gentille romance initiale est contredite par un Lento qu’on dira funèbre. Du chef finlandais Esa-Pekka Salonen on connaît surtout les opus pour grand effectif, dont l’esthétique complaisamment new age n’a guère retenu notre goût. En 1978, il composait pourtant Night Songs, une brève suite de courtes séquences de facture parfaitement sérielle. Tout donne à penser que le jeune homme – il avait donc vingt ans – s’est trouvé face à un mur dans son respect de la méthode, au point de lui tourner si radicalement le dos. Cela dit, ces Chants nocturnes demeurent faiblement inspirés, malgré la lecture nuancée qu’on en apprécie.

La Sonate pour clarinette et piano Op.28 de Mieczysław Weinberg constitue le principal intérêt de ce moment – on joue encore trop rarement l’œuvre de ce compositeur intéressant à plus d’un titre que ces pages évoquent volontiers [lire nos chroniques de L’Idiot, 27 juin 2013, du DVD La passagère et du Concerto Op.67 en CD]. La sonate de 1945 est ouverte par une arabesque de clarinette seule, profonde plainte que le clavier reprend en une sorte de bourdon sur lequel l’Allegro proprement dit s’érige alors. Faussement anodine, la promenade de l’Allegretto centrale bénéficie du souffle simplement inépuisable d’Annelien van Wauwe, mis au service d’une musicalité ténue [la diffusion en direct de ce concert est disponible sur le site de France Musique jusqu’au 23 août]. Pourridié invasif, le tournoiement angoissé de l’Adagio final laisse songeur…

BB