Chroniques

par laurent bergnach

Wolfgang Amadeus Mozart
La clemenza di Tito | La clémence de Titus

1 DVD Arthaus Musik (2006)
102 009
production du Théâtre de Drottningholm (1987)

Avant que la postérité associe son nom à celui de Mozart – et, dans une moindre mesure, à celui de Gluck (1752) –, La clemenza di Tito est d'abord une œuvre du Vénitien Antonio Caldara (1670-1736), créée à Londres le 4 novembre 1734, à la gloire de l'empereur Charles VI. Réduit et adapté par Caterino Mazzolà, le livret original du poète Pietro Trapassi – dit Metastasio – présente un argument idéal pour rendre hommage à Leopold II, grand-duc de Toscane dont on préparait le couronnement comme roi de Bohême. En effet, de même que Titus qui régna de 79 à 81 après J.-C., l'homme jouissait d'une grande popularité pour ses actions : commerce du grain libéré, torture et peine de mort abolies, organisation d'une paix durable avec la Turquie, etc. Malheureusement, son règne dura aussi peu que celui de l'empereur romain et sa mort, le 1er mars 1792, mit fin à une période heureuse.

Créé à Prague le 6 septembre 1791, jour de la montée sur le trône, La clemenza di Tito est un opera seria en deux actes, genre formellement rigoureux auquel s'était plié Mozart dans sa jeunesse avant de transgresser ses codes. Travaillant déjà sur Die Zauberflöte – qui sera son dernier opéra – et sur un Requiem commandé de façon anonyme par le comte Franz von Walsegg – lequel se prétendait compositeur mais payait des nègres –, le musicien passe moins de trois semaines sur la partition, confiant même à un élève peu inspiré la réalisation des récitatifs secco. À cause de son éloge d'un « astre porteur de paix », de sa faible progression dramatique, le triomphe n'est pas immédiat, et cette œuvre de la maturité – surtout après une trilogie Da Ponte si peu conventionnelle – a longtemps été dédaignée.

Conventionnelle, la mise en scène de Göran Järvefelt pour cette production du Théâtre de Drottningholm (1987) l'est aussi, dont le nom n'apparaît même pas sur le recto du DVD. Pourtant, la courte durée de l'œuvre, les fréquents changements de décor (toiles et panneaux peints, à l'ancienne), aident à apprécier ce classicisme assumé jusqu'aux costumes des musiciens en fosse, que dirige Arnold Östman, alerte et léger. Sans être inoubliable, la distribution vocale est honnête. Anita Soldh (Vitellia) jouit d'une grande souplesse qui lui assure des aigus faciles et des vocalises aisées. Stefan Dahlerg (Tito) gagne en ampleur, faisant oublier un timbre un peu dur. Maria Höglind est un Annio touchant, au timbre riche. Si l'on veut bien oublier son jeu trop extérieur, Lani Poulson s'avère un Sesto attachant et nuancé. La clarté de Pia-Marie Nilsson (Servilia), la sonorité de Jerker Arvidson (Publio) finissent d'équilibrer ce sextuor talentueux.

LB