Chroniques

par laurent bergnach

Wolfgang Amadeus Mozart
Die Zauberflöte | La flûte enchantée

2 DVD TDK (2005)
DVWW-CLOPMF
reprise de la production signée Jean-Pierre Ponnelle, en 1982, à Salzburg

Vif succès publique et critique, cette Flûte enchantée de Mozart reçut nombre d'acclamations lors de sa première représentation au Festival de Salzburg, le 28 juillet 1978. Le choix du metteur en scène y était pour beaucoup. Jean-Pierre Ponnelle (né à Paris en 1932, mort à Munich en 1988) fut en effet un des metteurs en scène les plus productifs, les plus imaginatifs de sa génération, et sa renommée fut internationale à l'aube des années soixante-dix. S'il fit ses débuts comme décorateur, ses études de peinture, de philosophie et d'histoire semblaient le destiner à cet art total qu'est l'opéra. Wagner fut sa première rencontre avec le métier (Tristan und Isolde, en 1963, à Düsseldorf), mais il servit énormément le drame italien (Rossini et Monteverdi en tête), ainsi que Mozart. Grand succès, donc, puisque cette captation (à l'image pour le moins granuleuse) date d'une reprise du 21 août 1982.

La mise en scène de Ponnelle se réfère à l'époque de création de l'œuvre, celle d'une transition entre le baroque – marqué par le pathos et la gestuelle de la Reine de la Nuit et des Trois dames – et le classicisme naissant, porteur d'espoirs aussi clairs que le soleil, aussi simples que la coupe des vêtements. Un plateau de pierre et de plantes, surplombé des galeries à arcades de la Felsenreitschule, sert de cadre unique à cette production, mais Ponnelle a su l'utiliser au mieux, notamment par un recours surprenant à un jeu de trappes : théâtre de tréteaux et temples sortent des planches, Pamina y disparaît, etc. La direction d'acteur est vivante, habitée, et nous réserve quelques gags bienvenus.

Côté chant, malheureusement, les critiques sont de mise, que cela concerne Peter Scheier (Tamino vaillant mais aigrelet), Ileana Cotrubas (Pamina peu expressive) ou Martti Talvela (Sarastro fatigué). Si la maîtrise d’Edita Gruberova (Reine de la Nuit) est à signaler, c'est surtout Christian Boesch qui emporte l'enthousiasme avec son Papageno à la voix ample et nuancée. Incarnant ce « joyeux compagnon », immature et bougon, bondissant et touchant, le baryton s'amuse comme un gosse et grâce à lui, nous prenons plaisir à suivre de nouveau cette fable sur la sagesse et le mensonge, sur le silence et la musique.

En fosse avec les Wiener Philharmoniker, James Levine donne une lecture délicate et soignée de l'œuvre (une ouverture quasi romantique), même si on aurait aimé des nuances un peu plus contrastées. Si on peut facilement trouver des rivales à cette version, elle sait du moins nous rappeler que « clochettes d'argent, flûtes magiques sont nécessaires à notre salut ».

LB