Chroniques

par anne bluet

Sergueï Liapounov
Symphonie en si bémol mineur Op.66 n°2

1 CD Naïve / Radio France (2004)
V 4974
Sergueï Liapounov | Symphonie n°2

Pianiste, pédagogue, compositeur, Sergueï Mikhaïlovitch Liapounov est l'exemple même de l'artiste broyé par les affres de l'Histoire, oublié, redécouvert... Il est né en novembre 1859 à Iaroslav. Très jeune, il suit les classes de piano de Klindworth, Pabst et Wilborg, apprend la composition avec Piotr Tchaïkovski et Sergueï Taneïev. La musique nationale devient son principal centre d'intérêt. Ses diplômes obtenus, il rejoint l'école populaire de musique de Saint-Pétersbourg, animée par Mili Balakirev. En 1893, les deux hommes participent à une commande de la Société Impériale de Géographie : recueillir des mélodies populaires à travers la campagne russe. Au final, trois cents mélodies sont rassemblées que le jeune musicien harmonise. En 1894, il succède à Nikolaï Rimski-Korsakov à la tête de la Chapelle Impériale. En 1910, il devient professeur au Conservatoire Impérial de Saint-Pétersbourg. Pianiste virtuose, de nombreuses tournées à Vienne et Paris jalonnent sa vie. Incapable de s'adapter au nouveau régime révolutionnaire, il fuit la Russie au début des années vingt. En 1923, il ouvre à Paris une école de musique pour les Russes émigrés. En 1924, à quelques heures d'un récital de ses propres œuvres à la Salle Gaveau, il décède d'une crise cardiaque.

Hommage au grand art symphonique russe du siècle précédent, la composition de la Symphonie en si bémol mineur Op.66 n°2 occupa toute l'année 1917, pour s'achever au moment de la prise du pouvoir par le nouveau régime, en décembre. Jamais Liapounov ne l'entendrait jouée en concert : elle ne serait créée qu'en 1950, par Evgueni Mravinski et l'Orchestre Philharmonique de Leningrad. Trente-huit ans plus tard, c'est l'excellent Evgueni Svetlanov qui dirigeait l'Orchestre Philharmonique de Radio France pour sa première française : un concert donné Salle Pleyel le 27 novembre 1998 et dont la belle collection Radio France chez Naïve livre aujourd'hui un témoignage précieux.

Les couleurs et la maîtrise orchestrale de Rimski-Korsakov, l'inventivité fébrile de Balakirev, l'élégante tension de l'écriture de Liszt, la suave dynamique de Tchaïkovski, mais aussi le thème superbement mahlérien du troisième mouvement ... À découvrir absolument !

AB