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Chroniques
Richard Wagner
Die Walküre | La Walkyrie
Voici la Première journée d'une Tétralogie montée au Deutsches Nationaltheater de Weimar, au printemps 2007. Bien que les proches de Wotan soient à présent somptueusement installés au Walhalla, la discorde familiale se poursuit à la génération suivante, et cette lutte entre l'amour et la volonté de puissance sème le désordre dans un monde dont l'harmonie n'est qu'illusoire. Michael Schulz met en scène la rupture de façon prenante et radicale quand une petite réunion bourgeoise autour de la harpe se désagrège au son d'un cri d'enfant (Hagen, élevé sans amour) et d'une sirène d'alarme. La musique peut alors commencer, dans une urgence batailleuse qui annonce, à elle seule, la fin du repos. Comme pour Das Rheingold [lire notre critique du DVD] et en dépit de cordes généralement approximatives, Carl St.Clair offre une lecture impeccable, du Prologue énergique jusqu'à l'embrasement final s'accomplissant dans un suave ralenti orchestral.
Dans la demeure de Hunding, Siegmund et Siegliende sont prisonniers d'un jeu quasi muet au cours duquel ils se cherchent et se trouvent – l'odeur servant de lien entre le trouble présent et les souvenirs du passé. En renommant les choses comme des enfants, ils refusent le monde adulte de Hunding, lequel s'entoure d'une assemblée armée de bâtons, peu sensible à la poésie du monde. Sous le toit de Wotan, différents climats se côtoient également : d'un côté s'épanouissent la fraîcheur et la fantaisie de Walkyries aux allures de gamines au pensionnat, de l'autre se durcissent l'entêtée Fricka, gardienne d'un troupeau de béliers, et son époux contraignant Brünnhilde à regarder une opération chirurgicale – métaphore contestable de son despotisme. Malgré tout, l'opéra se ferme sur des sourires de réconciliation entre père et fille.
Vocalement, nous sommes aussi séduits. Face à Hidekazu Tsumaya d'une grande autorité, mais qui accentue le côté brutal de Hunding par une émission bancale, Erin Caves (Siegmund) fait montre de précision, de beaucoup de phrasé et d'une belle accroche grave, tandis que Kirsten Blanck (Sieglinde) offre un engagement dramatique émouvant, en plus d'un chant présent, coloré et très articulé. Au jeu trop extérieur, Renatus Mészár propose un Wotan sans charisme particulier mais d'une grande santé, sans esbroufe et surtout nuancé (douceur des attaques, en particulier). Au côté de la Fricka déjà connue de Christine Hansmann, Catherine Foster incarne une Brünnhilde bonne fille, attendrissante. Signalons enfin le jeu tout en finesse de la comédienne Erika Krämer, Grane anthropomorphe.
LB