• CD

Dans la seconde partie du XIIe siècle, un fascinant ferment esthétique se constitue, l'École de Notre Dame, sans doute la plus prestigieuse période de l'histoire de la musique française. Pérotin en fut le maître après Leoninus dont il poursuivit les recherches en les enrichissant d'une inventivité sans pareille qui manifeste d'une approche personnelle, ce qui ferait de lui le premier compositeur dans le sens occidental.

L'Ensemble Gilles Binchois et Dominique Vellard, dont nous avions présenté le disque Les Escholiers de Paris il y a quelques mois [lire notre critique du CD], proposent une lecture d'une grande intelligibilité de quatre pièces de Pérotin, alternant avec motets, organum et conduits grégoriens anonymes (O Maria, Mater Pia ; Deus Pacis ; Luget Rachel et Benedicamus Domino)

On admirera l'articulation d'une clarté salutaire du Sederunt principes à quatre voix qui ouvre ce programme, et aussi le soyeux Salvatoris Hodie dont les mélismes offrent autant de mystère que d'agrément, une facture qui nous envoûte dans les terreurs rituelles d'un texte d'un paganisme déroutant. Avec le plus austère Beata viscera, cet enregistrement sait envahir l'auditeur d'une écriture en apparence plus simple – mais en apparence seulement ! – qui demeure la marque d'un très grand génie.

Les choix sont ici judicieux, suggérant dans leur succession une écoute active : à l'orgiaste organum du début s'opposent la monodie que l'on vient de citer, la fausse sévérité de Et valde (Leoninus et Pérotin) trouvant un chemin médian par l'extrême raffinement de son travail de timbres. Enfin, signalons le texte de présentation d’Edward Roesner qui constitue un accompagnement éclairé.

AB