Chroniques

par laurent bergnach

récital Aurora
Cailò – Fiorenza – Leo – Marchitelli – Supriani

1 CD Arcana (2017)
A 429
L'ensemble Aurora joue Cailò, Fiorenza, Leo, Marchitelli et Supriani

Fondé voilà trente ans par le violoniste Enrico Gatti et d’autres musiciens issus d’écoles prestigieuses (Bâle, Genève, Salzbourg, etc.), l’ensemble Aurora s’est spécialisé dans la musique italienne des XVIIe et XVIIIe siècles. Afin d’en rendre au mieux les spécificités (dynamique, articulation, raffinement, etc.), les instrumentistes ont privilégié les luthiers de l’époque : Hendrick Jacob (1629-1704), Cornelius Kleynman (c.1670-c.1699) ou encore Antonio Ungarini (1696-1771).

Dernièrement, Aurora interprétait Corelli pour le même éditeur, avec un magnifique talent. Aujourd’hui, il offre un florilège de musique napolitaine conçue entre 1650 et 1750, terreau d’une « tradition indépendante, forte et influente » (dixit le musicologue Guido Olivieri), dont Giovanni Carlo Cailò (c.1659-1722) est l’invité principal. La raison en est simple : de par ses acquis romains, il est fort probable que ce dernier a participé à l’essor de la sonate pour trois violons dans la ville portuaire. Seules trois sonates subsistent de ce proche d’Alessandro Scarlatti, ici gravées pour la première fois : Sonata per violino e basso continuo, Sonata a tre violini e organo, ainsi que Sonata per due violini e cembalo.

L’autre invité marquant est Pietro Marchitelli (1643-1729) dont Charles Burney rapporte que la virtuosité mit à mal celle de Corelli, pourtant réputée à travers l’Europe. On peut croire l’anecdote puisque le natif des Abruzzes fut premier violon de la Chapelle royale durant près d’un demi-siècle. De la trentaine de sonates qu’on lui attribue, plus ou moins complètes, Sonata II per tre violini e basso et Sonata VIII per due violini e basso nous sont offertes.

Trois héritiers de cet art naissant complètent le programme : Francesco Paolo Supriani (1678-1753), auteur de la première méthode italienne de violoncelle, Leonardo Leo (1694-1744), organiste et professeur (Piccinni, Jommelli) au style empreint de galanteria, enfin Nicola Fiorenza (c.1700-1764), violoniste et pédagogue.

Profitant de la belle acoustique de l’église Santa Caterina da Siena (Naples) où ils enregistrèrent en mai 2016, cinq musiciens entourent le maestro di concerto Enrico Gatti : Marie Rouquié, Joanna Huszcza, Sebastiano Airoldi (violon), Gaetano Nasillo (violoncelle) et Guido Morini (orgue, clavecin). Souplesse et délicatesse (attaques, accentuation) caractérisent l’interprétation d’Aurora qui intaille ces pages avec une allégresse toujours digne, une mélancolie précieuse. Sans hésiter, saluons cette sortie d’une Anaclase !

LB