Chroniques

par laurent bergnach

ouvrage collectif
L'inouï n°1 (revue de l'Ircam)

Éditions Léo Scheer (2005) 144 pages + un guide d'écoute multimédia
ISBN 2-915280-92-4
L'inouï n°1 (revue de l'IRCAM) paru en 2005

S'entretenant avec Sarkis (artiste multidisciplinaire) en troisième partie d'ouvrage, Bernard Stiegler rappelle le sens qu'il donne à cette première parution de L'Inouï, revue qui sera éditée chaque année par l'Ircam, au mois de juin : « Je voudrais que cette revue soit, sinon un guide d'écoute, car je ne crois pas qu'il faille guider l'écoute, du moins un instrument qui contribue à créer une disposition dans le public, à le rendre disponible aux œuvres qu'il peut avoir à entendre, à découvrir, dans un festival comme Agora, et ce, précisément au moment où nous connaissons aujourd'hui une époque de désorientation généralisée : une perturbation complète de la cardinalité générale, et qui est sans doute irréversible ». Du coup, on comprend mieux le sens de cette plateforme isolée entre tempête et accalmie, utilisée comme support visuel cette année.

Directeur de l'Ircam, Bernard Stiegler souhaite faire un lien entre le moment de l'écoute en concert et celui à domicile en abordant dans chaque numéro plusieurs parties bien établies. La première abordera – par divers biais – une œuvre toute nouvelle ; ainsi, les deux représentations parisiennes d'Avis de tempête permettent à Georges Aperghis de revenir, avec Peter Szendy, son librettiste, sur le travail préliminaire, mais aussi, pour nous, de découvrir le DVD-Rom offert, composé de notes de travail, de commentaires de Sébastien Roux (assistant musical), d'extraits du spectacle et de fichiers sons.

La seconde partie réunira différentes réflexions (ici, le musicologue et chercheur Nicolas Donin, le directeur scientifique Hugues Vinet, le philosophe Bastien Gallet, le sociologue Antoine Hennion) autour d'un thème, tel ces conditions de l'écoute choisi cette année : quelles sont les nouvelles technologies musicales, les nouvelles pratiques du public, les nouvelles façons d'entendre et surtout de réentendre une œuvre – comme autant d'occasion de l'interpréter – ; voilà de quoi interroger le présent et l'avenir.

La quatrième et dernière partie proposera un dossier monographique sur un compositeur joué durant le festival. À l'honneur le 7 juin dernier aux Ateliers Berthier, Brice Pauset revient sur la composition de sa Symphonie n°III (anima mundi), tandis que différents intervenants décryptent d'autres œuvres du compositeur qui vit actuellement en Allemagne ; ce qui nous donne l'occasion d'une discussion avec Andreas Staier, créateur de la mise en regard schubertienne imaginée il y a quelques années.

Pour ce premier chapitre d'une histoire qu'on souhaite aussi longue que les murs qui l'abritent (bientôt trente ans !), Bernard Stiegler, philosophe également, s'est entouré d'une équipe variée et pointue. Si l'on peut bien sûr lire ce numéro indépendamment des concerts parisiens du printemps, il faut malheureusement un certain bagage au lecteur moyen pour suivre certaines étapes qu'il nous réserve, avec ses invités, dans cette réflexion sur le ouïr, aux frontières de surprise et redécouverte.

LB