Chroniques

par marc develey

Johann Sebastian Bach
concerti avec violon BWV 1041 – BWV 1042 – BWV 1052 – BWV 1056

1 CD Zig-Zag Territoires (2007)
ZZT 070501
Johann Sebastian Bach | concerti avec violon

C'est un baroque somptueux et pénétrant que proposent à notre écoute les quatre Concerti en la mineur BWV 1041, en mi majeur BWV 1042, en ré mineur BWV 1052 et en sol mineur BWV 1056 dont se compose cette livraison de Zig-Zag Territoires.

Au contraire des numéros BWV 1041 et BWV 1042, d'emblée composés pour le violon, les BWV 1052 et BWV 1056 font l'objet d'une reconstruction à partir de leur original pour clavecin, dans l'esprit même des pratiques musicales de Johann Sebastian Bach, qui laissaient la vie de l'œuvre s'étoiler du contrepoint de ses citations, transcriptions, transpositions, etc., sans la restreindre à sa fixation sur une partition plus ou moins canoniquement consacrée. L'ensemble se montre alors d'une grande homogénéité d'écriture et d'interprétation.

L'auditeur aura soin d'accorder une attention spécifique à chacun des moments de ce beau disque, tant la richesse en défit la description. L'ouverture de la galette sur le dynamique Allegro du BWV 1052 donne le ton : jouissant de l'engagement sans faille des musiciens, la pâte du contrepoint en est travaillée par la netteté incisive, presque rêche, des attaques, la fermeté du tactus et la diversité du phrasé. Joueuse, l'intensité musicale se déploie entre le mouvement instantané des variations expressives du soliste et l'ampleur des respirations d'ensemble, traçant ainsi les chemins d'une rhétorique aussi vive que passionnante.

Le violon d'Amandine Beyer et l'ensemble Gli Incogniti font alors de chaque numéro un miracle d'émotion que chaque écoute renouvelle. Ainsi, par exemple, de l'Adagio du Concerto BWV 1042, où le lamento du violon solo semble naître de l'ostinato, le clavecin en arpège prolongeant l'ethos tragique du continuo jusqu'à la longue supplique mélismatique finale. Ainsi encore du Largo élégiaque du BWV 1056, où entre air et récitatif, la soliste, tout en souplesse et bienveillance, mène une méditation discrète et chantante sur les gouttes pizzicati de l'orchestre, superbe synthèse entre le mouvement d'ensemble et les replis infinis de la dynamique baroque.

Ainsi en fin du dernier mouvement Allegro assai du BWV 1041, selon nous particulièrement représentatif de ces appogiatures liquides qu'Amandine Beyer travaille comme autant de gloses affectives instantanées d'une phrase au demeurant pensée sur la durée. Équilibre du contrepoint, dont on ne sait pas toujours si l'initiative appartient au soliste ou à l'orchestre, générosité de l'engagement, intelligence du jeu, sensibilité de la lecture : une grande leçon de musique qui s'approche à un cheveu d'une Anaclase !

MD