Chroniques

par anne bluet

Jacob Obrecht
œuvres sacrées

1 CD Hungaroton (2003)
HCD 32192
Jacob Obrecht | œuvres sacrées

Le label hongrois propose un troisième volet sur l'œuvre de Jacob Obrecht, musicien né à Gand vers 1458, et qui fut sans doute élève d'Antoine Busnoys à la Cour de Bourgogne. Il fut considéré comme l'un des principaux compositeurs dans les années 1480, et l'égal de Josquin. Maître à Cambrai en 1484, puis à Bruges quelques mois plus tard, il cherchera à confronter son art avec celui d'artistes d'autres écoles : il sera donc reçu à la Cour des Ducs d'Este à Ferrare en 1487, puis en 1504.

Après les messes O Lumine Ecclesiae et Malheur me Bat, János Bali et le Chœur A:N:S avaient enregistré les messes Pfauenschwanz et Si Dedero, ces deux disques ayant été particulièrement remarqués par la critique (respectivement Choc de la Critique en 1999 et Disque de l'Année en 2000). Le programme de cette troisième expérience s'ouvre sur la Missa de Sancto Donatiano, une œuvre de circonstance pour la Chapelle Saint Donatien de l'Église Saint Jacques de Bruges, vers 1488. La forme magistrale selon laquelle les quatre autres messes citées ont été composées n'est pas du tout au rendez-vous de ces deux-ci : de fait, l'expression en est beaucoup plus libre, moins ordonnée, diront les gâcheurs. Sans doute Obrecht eut-il besoin de renouveler sa facture, et pour ce faire d'expérimenter son talent vers d'autres directions, avant de retrouver une maîtrise plus disciplinée. Le résultat est d'une grande fraîcheur, et offre une vocalité extrêmement virtuose aux interprètes.

La Missa Sicut spina rosam elle aussi ne répond pas à la spécificité du répertoire : elle est construite à partir d'un répons grégorien, et n'utilise jamais le texte de la messe. Si étonnante qu'elle soit dans la production d'Obrecht, elle bénéficie d'une maîtrise évidente qui donne à penser qu'elle fut composée à la fin de sa carrière, alors qu'il était en poste à Anvers. La notice de Barton Hudson pose ces questions dans une présentation efficace qui permet bien à l'auditeur de resituer les œuvres.

Grâce à une interprétation très brillante et au plaisir de la découverte, ce disque est un bonheur !

AB