Chroniques

par vincent guillemin

Gustav Mahler
Symphonie en mi mineur n°7 « Nachtgesang »

1 CD Deutsche Grammophon (2015)
479 1700
Gustavo Dudamel joue la Symphonie n°7 de Gustav Mahler

Tranquillement, à la manière de Pierre Boulez ou d’Iván Fisher, Gustavo Dudamel enregistre les symphonies de Gustav Mahler avec l’Orquesta Sinfónica Simón Bolívar, sans respecter l’ordre chronologique de composition ni d’autre logique perceptible. Après une Cinquième intéressante en 2007 [lire notre critique du CD], alors que le jeune chef était encore plein de fouge, la Huitième en DVD était passé relativement inaperçue, tandis que la Symphonie n°9 déconcertait, sans doute par le manque de maturité face à une œuvre aussi complexe. Le jeune chef Vénézuélien a également laissé un enregistrement vidéo de la Première, mais avec le Los Angeles Philharmonic, pour le concert inaugural lors de sa prise de fonction en tant que directeur musical de cette formation, en 2009.

Présentement, le chef a choisi la Symphonie en mi mineur n°7 « Nachtgesang », l’une des plus difficiles à aborder et à tenir de bout en bout. L’exécution renseigne dès le départ sur la caractéristique de l’orchestre : il joue parfaitement juste, mais il ne faut pas en attendre les timbres de phalanges confirmés. Ces dernières années, le chef a évolué. Son interprétation impeccable de la Troisième avec les Berliner Philharmoniker cet été [lire notre chronique du 14 juin 2014] mettait en avant non seulement ses qualités de technicien, mais aussi l’extrême attention portée à chaque pupitre, à laquelle vient s’ajouter ici une sérénité adéquate. Toujours sans pathos, Dudamel maintient une unité globale durant toute l’œuvre et réussit à créer un véritable climat, sans pesanteur, mais plutôt dans une sorte de clair-obscur.

Les climax du Langsam ne sont jamais tonitruants et ne cherchent pas l’exubérance, tandis que les développements prennent leur temps, avançant lentement vers la nuit, à la façon de l’Alpensinfonie (écrite dix années plus tard par Richard Strauss). La maitrise de la coda du mouvement, tout comme sa retenue, montre un discours pensé de l’œuvre, tandis que l’orchestre convainc de plus en plus à mesure qu’il avance. Les bois sont clairement mis à l’honneur au début de la Nachtmusik I (Allegro moderato), elle aussi développée avec soin. La discrétion des interventions de timbales s’accorde avec l’option claire et non emportée.

Le Scherzo perd en douceur pour gagner en dynamique, bien qu’il semble lui manquer quelque énergie pour complètement séduire. La seconde Nachtmusik (Andante amoroso) retrouve les couleurs de la première. Elle affiche un hiératisme et une intériorité qu’on pourrait confondre avec un léger manque de souffle. Ce souffle, on le retrouve au Rondo-Finale qui regagne en dynamique et conclut avec entrain ce qu’il faut appeler une très bonne nouvelle version.

VG