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Chroniques
Giacomo Puccini
La fanciulla del West | La fille du Far West
« À cette curieuse époque, des gens venus de Dieu sait où groupèrent leurs forces dans ces lointaines terres de l'Ouest et, selon la rude loi du camp, oublièrent vite leur véritable nom, combattirent, rirent, jurèrent, tuèrent, aimèrent et accomplirent leur étonnante destinée d'une façon qui paraîtrait aujourd'hui incroyable. Nous sommes sûrs d'une seule chose, ils vécurent. »
Cette citation en tête de partition devait, pour Puccini, donner une idée de l'ambiance générale des trois actes de son œuvre. Comme pour Madama Butterfly (1904) [lire notre critique du DVD], c'est une pièce de l'auteur américain David Belasco qui inspire Puccini pour son opéra situé dans un camp minier, vers 1850, en pleine Ruée vers l'Or. Giuseppe Giacosa, un de ses co-librettistes fétiches étant décédé en 1906, il s'adresse à une autre équipe : Guelfo Civinini et Carlo Zangarini. L'orchestration est terminée en juillet et La Fanciulla del West créée au Metropolitan de New York, le 10 décembre 1910.
Le Shérif Rance est amoureux de Minnie, mais celle-ci préfère se rapprocher de l'étranger Dick Johnsson, qu'elle invite chez elle à passer la nuit. Jonhsson est en fait Ramerrez, un bandit recherché, qui lui avoue son coupable passé et son envie de mener à présent une vie honnête. Elle le chasse mais l'accueille à nouveau, alors qu'il vient d'être blessé par Rance. Une partie de poker avec le Shérif, durant laquelle elle triche, permet à Minnie de jouer la liberté de « son » homme. Fait prisonnier quelque temps plus tard, Ramerrez va être pendu quand Minnie intervient : durant des années, elle n'a rien réclamé aux mineurs en échange de son dévouement, ils doivent laisser le couple aller vers leur nouvelle existence. Ce qui est accordé, faisant de cet opéra puccinien un des rares où la femme n'est pas victime du désir de l'homme. Signalons la reproduction du texte complet dans le livret d'accompagnement.
Cet enregistrement de 1991, à la Scala de Milan, est malheureusement une grande déception. Côté décor, la reconstruction de La Polka – la taverne du premier acte –, puis celle de la maison de l'héroïne est plutôt réussit. Les voix masculines sont pour la plupart vaillantes et claires, de Plácido Domingo (Ramerrez) et Juans Pons (Rance) jusqu'aux rôles secondaires Sergio Bertocchi (Nick), Antonio Salvadori (Sonora), Marco Chingari (Wallace), etc.
Mais la direction d'acteurs bien lâche et la présence de Mara Zampieri (Minnie) viennent tout gâcher. Sorte de Nelly Olson qui aurait découvert McDonald avant l'heure, la soprano possède ni présence ni charisme. Son duo d'amour avec Ramerrez ne fonctionne pas. Sa voix droite et ultra précautionneuse, souvent couverte et forcée, change de place sans cesse. Autant dire que sans un minimum de ligne de chant, sa prestation est une catastrophe. Il y a pourtant un éclair de génie, lors d'une scène de rébellion à l'acte médian, où la voix est juste et colorée, comme si les prises de vues concernaient une autre soirée.
Si on ajoute que c'est un Lorin Maazel trop raide, manquant de moelleux et de sensualité, qui dirige d'un bloc l'Orchestre de la Scala, et que l'anglais est la seule langue offerte en sous-titrage, on se posera légitimement l'utilité de certaines commercialisations.
SM