Chroniques

par pierre-jean tribot

Felix Mendelssohn
Symphonies n°1 – n°5 « Réformation »

1 CD Hänssler Classic (2005)
CD 93-132
Felix Mendelssohn | Symphonies n°1 – n°5

Le mandat de Sir Roger Norrington à la tête de l'Orchestre de la SWR de Stuttgart aura donné un second souffle à sa carrière de chef d'orchestre. Si ses premiers disques pour Virgin avec ses London Classical Players pouvaient être parfois intéressants, ils péchaient souvent par une rigidité musicologique excessive qui masquait mal un manque d'inspiration et de vision d'ensemble. Depuis son arrivée dans la ville souabe, le chef anglais initie l'ancien orchestre de Sergiu Celibidache au jeu philologiquement exact et il multiplie les enregistrements pertinents pour le label Hänssler. On peut ainsi citer une Symphonie fantastique de Berlioz, une Grande symphonie de Schubert et une seconde intégrale des symphonies de Beethoven qui peut être considérée comme l'une des plus grandes réussites depuis les légendaires disques d'Harnoncourt.

Le présent enregistrement, qui prend place dans un projet Mendelssohn/Schumann, est de la même eau. Il regroupe les première et cinquième symphonies de Felix Mendelssohn que l'on enregistre peu en dehors d'intégrales. La Première symphonie en ut mineur de 1825 est l'œuvre d'un compositeur de seize ans. Elle se situe dans le prolongement des douze symphonies pour cordes et témoigne déjà d'une incroyable maîtrise de l'orchestration. En dépit du cinquième numéro dans l'écriture des symphonies, la « Réformation » est en réalité la seconde symphonie car sa composition remonte à 1828, soit peu après l'écriture de la première symphonie. Cette partition doit sa composition aux célébrations du tricentenaire de la Confession d'Augburg (1530) au cours de laquelle furent définies les doctrines de l'église luthérienne. Cependant, le climat troublé des années 1830 repoussa la création à 1832 et l'œuvre tomba ensuite dans un oubli, pour n'être reprise et publiée qu'une vingtaine d'années après la mort du compositeur.

Dans un court de texte et dans deux discours de présentation repris sur le disque, le musicien insiste sur la rigueur de son approche et l'attention particulière portée aux tempi. Dans la première symphonie, l'orchestre est en formation de chambre avec 16 violons, 6 altos, 4 violoncelles et 3 contrebasses. Norrington trouve rapidement le ton juste et rend, sans précipitation, l'énergie des allegros et la fluide liberté de l'andante et du menuetto. L'orchestre particulièrement affûté est riche en timbres et en nuances.

Pour la symphonie « Réformation », la nomenclature orchestrale est presque le double de la précédente œuvre à l'exception de l'andante joué en formation restreinte. Dans le premier mouvement au ton solennel qui cite l'Amen de Dresde (repris par Wagner dans Parsifal) et dans le finale illustré du célèbre choral luthérien Ein feste Burg ist unser Gott, Norrington réussit à maintenir, sans lourdeur, la tension alors que l'allegro vivace s'avère d'une grande précision tandis que l'andante se révèle d'une profonde émotion. Dans cette œuvre, l'orchestre s'adapte aux différents climats et les pupitres sont d'une grande netteté. Ce très beau disque Mendelssohn vient de placer en tête de la discographie aux cotés de Christoph von Dohnanyi et Claus Peter Flor pour la première symphonie et des mêmes plus Léonard Bernstein, Charles Munch, Claudio Abbado et Gaetano Delogu pour la « Réformation ».

PJT