Chroniques

par hervé könig

Carl Friedrich Abel
ouvertures – sinfonias

1 CD Passacaille (2002)
903
Carl Friedrich Abel | ouvertures – sinfonias

Carl Friedrich Abelest né à Köthen en décembre 1723. C'est dire s'il peut se familiariser à la musique de Bach dès son plus jeune âge. Issu d'une famille de musiciens, initié très tôt à la viole de gambe et au clavecin, il est engagé comme gambiste à l'orchestre de la cour, à Dresden. Après le siège puis la destruction de la ville par Frédéric le Grand, il se met à voyager à travers l'Allemagne et la France. C'est ainsi qu'il découvre le classicisme naissant, style qui l'influence dès lors (l'utilisation des vents, par exemple, se limite à un simple rôle de soutien, contrairement à l'habitude baroque.) En 1758, il s'installe à Londres, qui devient sa ville d'adoption. Ses compositions orchestrales, sa musique de chambre sont d'un haut niveau mais elles restent légères, énergiques et mélodieuses, si bien qu'accessibles à tous, elles sont très appréciées. Il dirige avec un égal succès les œuvres de ses collègues. Ainsi, de 1765 à 1781, la vie musicale londonienne sera marquée par l'amitié et la collaboration avec Johann Christian Bach, le fils cadet de Johann Sebastian. À la mort de ce dernier (1782), Abel rentrera pour trois années dans son Allemagne natale. Il donne quelques concerts, que la cour prussienne de Postdam apprécie grandement, elle aussi. Abel revient à Londres ; son désintérêt pour les concerts public est alors sensible, mais pas l'aide qu'il continue d'apporter à d'autres musiciens. Il y meurt le 20 juin 1787.

Resté dans l'ombre de Mozart et Haydn, Abel est encore, à l'heure actuelle, peu connu du grand public, sauf en Angleterre où on a continué à le jouer après sa disparition, et dont on est assez fier, voyant en lui une sorte de continuateur de Händel, comme lui exilé volontaire en Albion. L'analogie ne peut guère aller plus loin : Abel composa surtout des symphonies, de style déjà classique, mais aucun œuvre pour le théâtre. La plupart des enregistrements disponibles furent d'ailleurs longtemps anglais. On lui doit des sonates pour flûte, pour pianoforte, des quatuors à cordes, beaucoup de musique de chambre qu'il écrivit la plupart du temps à l'intention d'instrumentistes amateurs qui les jouaient aux concerts de Hanover Square, et de nombreux concertos : pour violoncelle, pour flûte, pour clarinette, ou pour piano. On pourra dire de ces pièces qu'elles sont marquées en général par un souci de pédagogie et de clarté tout en cherchant à faire briller leurs interprètes par l'emploi de rythmes syncopés et d'appoggiatures, sans que l'on puisse à proprement parler d'ornements. Abel rencontra Goethe, ce qui valut à sa production d'être longtemps considérée à tort comme émule du Strum und Drang : la seule étude des choix de tonalités comme la quasi absence de musique vocale, et donc d'illustration de tous thèmes littéraires ou de poèmes, nous montre qu'Abel n'avait que fort peu à voir avec cette influence.

Il Fondamento propose avec ce disque une remarquable contribution à la redécouverte de ce compositeur. Rappelons que cet orchestre fut créé il n'y a pas tout à fait quinze ans par de jeunes musiciens flamands, autour du hautboïste Paul Dombrecht. Spécialisé dans la musique des XVIIe et XVIIIe siècles, dans le jeu sur instruments d'époque, cet ensemble a choisi différents opus de Carl Friedrich Abel afin de rendre compte de différentes périodes compositionnelles. Le résultat est un moment d'une grande élégance, donné avec enthousiasme et une exquise délicatesse pour tous les andantes centraux.

HK