Chroniques

par samuel moreau

Beethoven van Beethoven
Variations Diabelli

1 DVD Virgin Classics / Idéale Audience Internationale (2004)
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Piotr Anderszewski interprète les Les Variations Diabelli de Beethoven

Les Variations Diabelli sont à Beethoven ce que sont pour Bach les Variations Goldberg : le testament pianistique d'un compositeur, une étape décisive dans la carrière d'un interprète. Avant que de jouer cette heure de musique, Piotr Anderszewski nous rappelle brièvement, dans un documentaire d'une vingtaine de minutes, les origines de cette œuvre, « concentration des émotions ».

En 1819, l'éditeur et compositeur Anton Diabelli (1781-1858) s'adresse à une cinquantaine de musiciens (Czerny, Schubert, Hummel, et bien d'autres, jusqu'au jeune Liszt, alors âgé de onze ans) en vue d'obtenir différentes variations d'une valse qu'il a écrite. Devant la médiocrité du matériau de départ, Beethoven commence par refuser. Il se ravise ensuite pour entreprendre en juin 1819 une série de trente-trois variations qui seront terminées quatre ans plus tard, en avril 1823. 33 Veränderungen über einen Waltzer von A.Diabelli, avant-dernière composition pour le piano, paraissent en juin de la même année, dans un recueil indépendant.

Juste quelques motifs, pas de thème… Quel défi pour le compositeur, s'extasie le pianiste – qui, bien avant ses débuts internationaux à Londres, en 1991, avait déjà impressionné plus d'un jury de concours par sa maîtrise de Beethoven – avant de nous livrer toutes « ces transformations, à partir de rien ! »

Et quand on pense avoir fait le tour du morceau primitif, on va encore plus loin après la 20ème variation… Majoritairement écrite en ut majeur, l'œuvre n'oublie pas l'humour et l'ironie, comme pour cette paraphrase de Don Giovanni. Piotr Anderszewski laisse parler un enthousiasme presque enfantin qui nous donne une belle leçon de musique, bientôt prolongée par son interprétation précise.

À une parfaite tenue des mains, le pianiste ajoute un jeu plein de relief. L'élégance alterne avec une certaine rudesse, le recueillement (20ème) avec une lourdeur relative, proche de la gravité (30ème), etc. Le pianiste et l'homme nous sont rendus très proche par la caméra intelligente de Bruno Monsaingeon qui, cette fois encore, fait merveille – voir les films sur Oïstrakh, Richter, et le récital Grigori Sokolov [lire notre critique de ce DVD].

Dans le livret, le violoniste-réalisateur explique les bonheurs et les soucis d'une telle entreprise, du choix de la méthode de tournage (effectué à l'été 2000, à l'Auditorio Stelio Molo de Lugano) jusqu'au montage final. Quand l'artiste est aussi bien devant que derrière la caméra, cela donne un magnifique cadeau pour les amoureux du clavier.

SM