Chroniques

par bertrand bolognesi

Xavier Phillips et Vincent Coq
Beethoven, Debussy et Kodály

Festival de l’Orangerie de Sceaux
- 2 août 2003
le violoncelliste Xavier Philips photographié par Céline Nieszawer
© céline nieszawer

La programmation du trente-quatrième Festival de l’Orangerie de Sceaux permet d’entendre, depuis un mois et jusqu’à la mi-septembre, une pléthore d’artistes dans des œuvres moins attendues que trop souvent. Entre les frères Capuçon dans une rare sérénade d’Ernö von Dohnányi le 30 août, les Guarnieri le lendemain, le Quatuor Parisii pour le concert d’ouverture en hommage à Alfred et Roger Loewenguth ou le récital Roger Muraro du 14 juillet, le menu est copieux. La présence d’Anaclase aux après-midi de l’Orangerie, commence par ce récital du violoncelliste Xavier Phillips [photo], qui joue un Gofriller de 1710.

Il l’ouvre avec la Sonate en la majeur Op.69 n°3 que Beethoven écrivit en 1808, menant parfaitement les longues phrases de l’Allegro ma non tanto, d’un grand souffle. La sonorité est soignée, parfois un peu confidentielle cependant, comme manquant de corps. Le piano de Vincent Coq se révèle savamment nuancé. Il respecte scrupuleusement les indications de frappes, sans craindre une sobre brièveté des fins de phrases. La pédale n’est utilisée que pour arrondir quelques attaques, sans exagération. Sur le Scherzo, le violoncelle accuse de sérieux soucis de justesse. En revanche, le travail pianistique est exemplaire, terminant le mouvement sur les pizz’ en imitant le timbre, avec une grande habileté. L’Adagio sera plus heureux, avec une unité sonore bien entretenue ; mais attention de ne pas se laisser piéger par des ralentis de plus en plus conséquents qui finissent par détruire la dynamique. Le dernier mouvement, par opposition, paraît très rythmique, voire marqué. On conclura que cette exécution commençait plutôt bien mais sans bénéficier d’une tenue durable.

Nous retrouvons ensuite la Sonate en ré mineur de Debussy que nous entendions il n’y a pas si longtemps par Patrizio Serinodans le cadre du Festival Jeunes Talents [lire notre chronique du 22 juillet 2003] et que Xavier Phillips donnait en janvier 2002 au Théâtre du Châtelet. Nous avait alors choqués la lourdeur de l’accompagnement de Vanessa Wagner. Ici, Vincent Coq avance une introduction sobre et se montre attentif au bon équilibre, tout en respectant idéalement le style et l’univers de l’auteur. Jeu choisi, grande qualité d’écoute, nuances précises : autant d’atouts dont on pourrait dire qu’ils ne seraient que la moindre des choses et qui pourtant ne sont pas si fréquemment de la partie Le violoncelliste se fond joliment dans l’intimité sonore. Mais Sérénade gagne à être moins directement « consommable ». Le troisième mouvement montre les mêmes problèmes constatés dans Beethoven : dès qu’il s’agit de jouer rapidement, Xavier Phillips accuse une maladroite inégalité de sonorité et des approximations malvenues.

En revanche, la Sonate Op.4 de Zoltán Kodály convainc. Aucune faille de sonorité et, au contraire, une saine hétérogénéité sur les deux mouvements. Cette interprétation bénéficie d’un bel engagement qui génère une écoute passionnée et bientôt émue. L’œuvre s’y déroule comme un paysage, avec une danse exquisément élégante (Allegro con spirito), précédée d’un Adagio souple. Pour sûr, ce répertoire convient mieux à Xavier Phillips.

Composée en 1948, d’après une brève esquisse rapidement jetée sur le papier huit ans plus tôt, la Sonate de Francis Poulenc clôt le concert. L’approche du violoncelliste semble parut par la partition, avec une Cavatine des plus banales qui passe à côté de la grave mélancolie de l’œuvre, mélancolie parente de l’Op.20 de Magnard. Bref, Xavier Phillips offre un récital inégal, avec de bons et de moins bons moments, et souvent superficiel.

BB