Chroniques

par laurent bergnach

Strand Behind
chorégraphie de Yuval Pick – etc.

Agora / Centre Pompidou, Paris
- 17 juin 2006
Strand Behind, chorégraphie de Yuval Pick
© christian ganet

Soucieux de soutenir de jeunes compositeurs, l'Ircam a mis en place, en collaboration avec des institutions partenaires, un dispositif de résidence qui permet à ces créateurs de poursuivre leurs travaux de recherche en dehors de l'institut. Une de ces conventions concerne le Conservatoire National Supérieur Musique et Danse de Lyon, lequel accueille depuis l'automne 2005 le Milanais Andrea Vigani (né en 1970). Sa collaboration avec le chorégraphe Yuval Pick a donné lieu à Strand Behind, créé le 17 février dernier à Décines.

Pour cette œuvre d'une vingtaine de minutes, le percussionniste Roméo Monteiro participe – avec l'électronique – à un flux musical en plusieurs strates : raclements sourds et boisés, bruits aquatiques, sons cristallins obtenus à partir de triangle, de lames de vibraphone, etc. Sur le reste de la scène, « dix interprètes explorent l'espace de leur liberté ». Immobiles un très long moment, les membres tendus vers le sol tels des insectes à carapace, les corps entre dans une danse asymétrique et hétérogène où se mêlent écroulement, contorsion, piétinements appuyés, corps à corps fugaces. Le public est conquis par la prestation du Jeune Ballet, qui apporte fraîcheur et innocence à un propos assez sauvage.

Autre percussionniste, Benoît Poly, le buste couché sur une grosse caisse, frôle, frotte, caresse ou frappe la peau de l'instrument à l'aide de ses doigts nus ou de divers marteaux. Comme précédemment, Croissance négative aborde sensualité et rudesse. Ces matières travaillées et déployées en quadriphonies rencontrent parfois les mots fermeture, suppression, chômage de masse qui expliquent le titre de la pièce de Boris Clouteau (né en 1971).

Entre la délicate interprétation de ...Sofferte onde serene…, l'œuvre de Luigi Nono créée par Maurizio Pollini (17 avril 1977), donnée ce soir par Emmanuelle Maggesi, et Talea ou la machine et les herbes folles (1986) de Gérard Grisey, se glisse une création mondiale. Fabrice Pierre dirige Dyades de Raphaèle Biston (née en 1975), une pièce attachante, tendue, qui explore les rapports d'un instrument ou d'un groupe avec un« double », reflet ou complément électroacoustique. Ici, les cordes crissantes et plaintives d'un quatuor semblent contaminées, au final, par la sereine présence d'une clarinette – les musiciens sollicités font partie de l'Atelier du XXe, un cycle de deux ans de formation à la pratique des musiques récentes, et dont le chef assure la direction artistique.

LB