Chroniques

par marc develey

récital François Leleux
œuvres de Britten et Mozart

Auditorium du Louvre, Paris
- 14 juin 2006
le hautboiste François Leleux joue Mozart et Britten au Louvre
© dr

Ouverture. Le hautbois solo de François Leleux se glisse avec une grande élégance et un beau sens du texte dans les atmosphères des Six Metamorphoses after Ovid Op.49 de Benjamin Britten. L'équipage du Phaéton cahote et tombe, anecdote dans l'histoire solaire du monde. Niobé, troublant et païen Stabat mater, pleure la mort de ses enfants et trouve, nouvelle montagne, sa résurrection dans l'impassibilité des roches et le lyrisme tranquille qu'évoquent les monts. Bacchus, ivre, titube parmi les femmes qui l'évitent : l'instrument se fait trompette, puis cancan. La floraison de Narcisse nous vaut un beau moment élégiaque au son souple et aux pianissimi veloutés. D'Aréthuse, enfin, l'on retient la fine prosodie qui de la course affolée fait une source joyeuse, fons amoris.

Faisant suite à ce beau moment, le Quatuor-Fantaisie pour hautbois et trio à cordes Op.2 (du même compositeur) laisse entendre, sur l'assise joliment équilibré du trio à cordes, la souplesse d'un hautbois à l'articulation fort liée. L'alto d'Antoine Tamestit et le violoncelle de Danjulo Ishizaka contribuent grandement au climat parfois mystérieux de l’exécution. Notons toutefois que la différence de facture des instruments laisse clairement se détacher le son plein de l'alto (Étienne Vatelot 1999) sur celui, plus velouté, des violon et violoncelle (deux Stradivarius), sans toutefois porter préjudice à la musicalité.

La seconde partie de la soirée est consacrée à Mozart. Du Duo pour violon et alto en si bémol majeur K.424 n°2, on apprécie la belle sobriété de l'Adagio d'ouverture, la grande souplesse du violon de Daishin Kashimoto n'y souffrant peut-être que d'une touche d'aigreur dans certains aigus. On regrette d'autant de ne pas retrouver dans les suivants l'équilibre de ce premier mouvement. L'Andante cantabile, à l'élégance précieuse et quelque peu languissante, doit à sa brièveté de ne pas lasser. Quant aux variations de l'Andante graciozo, elles se montrent légèrement en-deçà des promesses de l'œuvre, par défaut de présence ou excès de retenue. Retenons cependant la rondeur de son et le phrasé à la fois précis, efficace et sobre d'Antoine Tamestit ; d'y être comparé, le violon, plus rudement manié, pâtit parfois. L'ensemble reste toutefois globalement plaisant.

Le Quatuor pour hautbois et cordes en fa majeur K.370 nous trouvera moins réservé. Le chant est toujours très agréablement déployé par le hautbois, en dépit même d'un trop de rondeur dans les forte, tandis que l'équilibre des cordes lui offre le soutien d'une délicate musicalité. L'élégance de l'Allegro, les tensions de l'Adagio, le charme du Rondo, tout cela signe un fort plaisant moment de musique. En bis, l'ensemble donne une belle transcription pour hautbois de l'Adagio du Quatuor avec flûte K.285 : sobriété raffinée du hautbois, grande justesse d'intention des cordes (du violoncelle en particulier), malgré l'insistance de pizzicati parfois un peu trop sonores – touchante conclusion à ce concert.

MD