Chroniques

par bertrand bolognesi

Quatuor Diotima
cycle Beethoven|Boulez|Schönberg II

ProQuartet / Théâtre des Bouffes du nord, Paris
- 25 novembre 2012
le Quatuor Diotima recrée le Livre de Boulez en un cycle de quatre concerts
© marion gravrand-daanaka

Le deuxième rendez-vous de ce cycle [lire notre chronique du 19 novembre 2012] est ouvert par le Quatuor en fa # mineur Op.10 n°2 avec voix d’Arnold Schönberg. Le Quatuor Diotima s’ingénie à révéler tout le nuancier de cette partition achevée en 1908, grâce à une dynamique soigneusement travaillée, à des choix de couleurs finement amenés, une rondeur de sonorité qui ménage des moelleux indicibles à l’articulation. Sehr rasch impose une nauséeuse touffeur funèbre à la citation que l’on sait, dans un dense tourment. La Litanei se fond d’emblée dans le feutré de l’alto (Franck Chevalier), rehaussé bientôt par la voix de Juliane Banse au legato confondant. Le soprano livre une interprétation d’une fluidité rare, par-delà la difficulté des intervalles, et invite un certain ton aux divers relais instrumentaux du passage, dans une expressivité infiniment souple. L’ultime sehr langsam se ciselle dans cet écho.

Bond dans le temps, ensuite, avec les sections 3 et 5 du Livre pour quatuor de Pierre Boulez, venant compléter le souvenir qu’on garde de la section 1 entendu lundi soir. Vraiment ?... Cette fragmentation de l’œuvre au concert n’est certainement pas un avantage : ainsi de ces parties qui aujourd’hui semble tomber on ne sait d’où et qui laissent l’écoute sur sa faim. On apprécie cependant la précision et la respiration ténue de l’exécution du jour, révélant de nombreux germes des opus bouléziens à venir.

Contrairement à lundi, c’est un Beethoven plus élégamment équilibré auquel est consacrée la seconde partie du concert. L’Adagio du Quatuor en mi bémol majeur Op.130 n°13 se contraste parfois aux confins de la nuance, les musiciens développant une grâce indéniable à l’Allegro qui s’ensuit. Le Presto semble résister, toutefois, tandis que l’Andante s’avère effroyablement glacial et de moins en moins exact. Après une Danse allemande plus généreusement respirée, le Grande Fugue déçoit : les instrumentistes paraissent s’y retrouver assez laborieusement, il faut bien le dire, l’architecture en est trop sûrement marquée, tandis que des soucis de hauteur jonchent ce moment de fâcheuses approximations qui laissent poindre la fatigue à la fin d’un programme lourd (le cycle en soi, bien sûr, mais encore le menu de chaque soirée, fort copieux).

BB