Chroniques

par bertrand bolognesi

Orchestre du Conservatoire de Paris, Ensemble Intercontemporain
Veli-Matti Puumula | Seeds of Time

Alban Berg | Lulu Suite
Cité de la musique, Paris
- 20 janvier 2009

Dans le programme La fin du temps proposé par la Cité de la musique, l’Ensemble Intercontemporain donne un concert où le presque-tout-neuf côtoie l’ancien-tout-neuf, où l’expérience de ses solistes ô combien excellents encadre les plus jeunes, puisqu’ici Susanna Mälkki dirige également les musiciens de l’Orchestre du Conservatoire de Paris.

Créé à l’automne 2004 en Suède, Seeds of Time du Finlandais Veli-Matti Puumula s’articule comme un concerto pour piano et orchestre (près d’une soixantaine d’instrumentistes) en trois mouvements enchainés de durées inégales. Turba, le premier, est le plus conséquent. Il est suivi du bref et énergique Premura puis conclu par l’épisode semi-désertique qu’est Il Braccio della Notte. L’œuvre vectorise le piano soliste vers différents groupes instrumentaux, recourant volontiers à des habitus de jeu proche du music hall, pour ne pas dire des couleurs cabaretières. Le geste général paraît énergique et se régénérer avec une belle santé, prenant appui sur une écriture rythmique largement développée. L’on demeure coi face à une écriture solistique qui superpose des cadencesd’un vaporeux new age parfumé de souvenirs de Satie à une vacuité empruntant à Miles Davies, le tout avançant d’un chaos finalement décevant à une raréfaction affectée.

La seconde partie de la soirée est assurée par les élèves du Conservatoire, seuls cette fois, dans la redoutable Lulu Suite qu’Alban Berg réalisait en amont de la création de sa Lulu, l’opéra d’après Wedekind qu’une mort prématurée laisserait inachevé. On se souvient de l’incarnation du rôle-titre par Laura Aikin, immortalisée par l’image [lire notre critique du DVD] ; aussi est-ce avec plaisir que l’on retrouve le soprano américain dont la voix semble s’être élargie.

Si l’interprétation de Susanna Mälkki conjugue une prodigieuse tendresse, un lyrisme discrètement sensuel et une expressivité violente, la prestation de l’orchestre, pour répondre aisément aux inflexions de dynamique, peine à servir la partition. J’utilisais plus haut l’adjectif redoutable : c’est que l’œuvre, pour recourir au grand effectif, met plus d’une fois à nu tel musicien en des traits qui nécessitent précision et rapidité d’adaptation, plus simplement cette sorte d’autorité qui ne s’acquiert qu’avec le temps. Rien d’étonnant, donc, à ce que lesdits traits déçoivent. Il n’en faut pas conclure que l’Orchestre du Conservatoire n’est pas à la hauteur de ce texte, non ; c’est plutôt qu’il est peut-être trop ambitieux de le lui faire jouer.

Pédagogiquement, confronter de jeunes musiciens à cette partition est parfaitement défendable et, sans doute, bénéfique. Le dernier chant s’élève avec grâce, tandis que la cheffe clôt le drame dans une vigueur sans appel.

BB