Chroniques

par bertrand bolognesi

Orchestre de Paris, Ilan Volkov
œuvres de Bartók, Berlioz et Sibelius

Salle Pleyel, Paris
- 29 novembre 2006
Ilan Volkov dirige l'Orchestre de Paris (photographie de Simon Butterworth)
© simon butterworth

Il n'est pas si fréquent qu'un chef (jeune, qui plus est) ayant à remplacer un confrère souffrant maintienne l'intégralité du programme prévu. Aussi félicitera-ton Ilan Volkov d'hardiment relever le défi lors de cette soirée initialement placée sous la battue d'Esa-Pekka Salonen. Né en Israël il y a trente ans, le musicien connaît aujourd'hui un beau début de carrière qui l'amène à diriger de prestigieuses formations, tels les Northern Sinfonia de Newcastle, London Youth Symphony, Boston Symphony, New York Philharmonic, etc. Il y a trois ans, il succédait à Osmo Vänskä à la tête du BBC Scottish Symphony Orchestra. Pour la scène lyrique, il conduisit Eugène Onéguine à San Francisco et lors d'une tournée de la production de Glyndebourne, festival qui lui confia cette année la fosse du Midsummer Night's Dream de Britten.

Dès les premières mesures de Finlandia Op.26 de Sibelius, les cuivres de l'Orchestre de Paris affirment une parfaite gestion de l'inertie naturelle de ces instruments, provoquant bien souvent des soucis d'attaque. Ce soir, on constatera non seulement une efficacité exemplaire sur ce point, mais aussi une remarquable égalité quasi chorale de la mélodie initiale. Cependant, la suite de l'exécution jugulera l’enthousiasme : les tutti sont, pour ainsi dire, brumeux, la lecture manque de tonicité et l'emphase se prive d’autant de lyrisme que de relief.

On retrouve la même « graisse » indifférenciée dans la Suite du Mandarin merveilleux de Bartók, donnée sans le formidable bruissement qu'on en souhaite, comme une laborieuse mise en place où les alliages timbriques ne prennent pas, où le déchainement final attendu n’est jamais au rendez-vous, où la dynamique, enfin, se résume à une démonstration timide et statique, sans le moindre élan.

Plutôt rendue frileuse par cette première partie, l’écoute se laisse surprendre par l'interprétation des Extraits symphoniques de Roméo et Juliette H.79 de Berlioz. Bien qu'elle ait à regretter une Grande fête chez les Capulets beaucoup trop sage, sans danger comme sans bulles, les quatre autres mouvements affichent une élégance rare. L'Introduction rompt avec l'inertie précédente par une articulation enlevée, tandis qu'une pâte exquisément moelleuse sert la Scène d'amour, avant la grâce clarteuse du Scherzo de la Reine Mab. Enfin, le lyrisme un rien réservé, gravement méditatif, de Roméo seul laisse songeur.

BB