Chroniques

par david verdier

Madama Butterfly | Madame Butterfly
opéra de Giacomo Puccini

Grand Théâtre, Genève
- 26 avril 2013
Madama Butterfly (Puccini) vue par Michael Grandage à Houston et Genève
© vincent lepresle | gtg

Sous le soleil levant, décidément rien de nouveau. La scénographie de Michael Grandage présente un menu peuple tout droit sorti d'estampes, s'animant telle une crèche vivante avec force salutations, courbettes et petits pas. Lampions et pins se découpent impeccablement sur un fond bleu cobalt dont les subtils dégradés évoquent brièvement ceux de Bob Wilson. Nulle part, cependant, la volonté de styliser l'action et les rôles. Il ne manque pas un galon aux épaulettes du lieutenant Pinkerton, pas une perle à l'aigrette de Cio-Cio San. Cette production tout terrain a traversé l'Atlantique, en provenance de l’Houston Grand Opera ; il faudrait pourtant situer la signature esthétique du côté de Jean-Pierre Ponnelle et de son ineffable version filmée – un modèle du genre, pour des générations encore.

L'opéra n'exige pas les mêmes apprêts que le cinéma, particulièrement en ce qui concerne les éclairages, les décors et la direction d'acteur. Sur ces trois points, il est évident que cette production ne se distingue pas d'un travail anecdotique, au plus près de la carte postale fleurie et d'une certaine forme de convention. On comprend très vite, par exemple, qu'il n'y a pas grand chose à espérer du panneau coulissant latéralement ou d’un plateau qui tourne sur lui-même durant l'attente du retour de Pinkerton. Ultime déception, le seppuku de l'héroïne pèche par trop de maniérismes, déviant le point culminant de la tension musicale et visuelle.

On peinera à trouver dans les aigus malaisés de Karine Babajanyan le bonheur qu'on espérait y trouver. Les changements de registres fort audibles et le vibrato problématique perturbent tout le premier acte avant de se stabiliser pour Un bel dì vedremo aux qualités de souffle surveillées mais sans faux-pas, à défaut d'émouvoir. Dans les duos, le soprano arménien trouve plus facilement ses marques, même si elle doit concéder à Arnold Rutkowski la palme de la vocalité. Le jeu sobre (voire maladroit) du ténor polonais ne contredit pas un legato très fluide et une assurance d'intonation. Jeremy Carpenter est un Sharpless probant, au timbre un peu sec mais sans complaisance. Cornelia Oncioiu triomphe sans peine du rôle de Suzuki, avec une couleur ambrée superbement modulée. Khachik Matevosyan n'impose rien de marquant dans son costume de bonze, contrairement à Hubert Francis qu'on jugera sur-distribué tant la voix porte fièrement par-delà certains premiers rôles.

L’Orchestre de la Suisse Romande mérite mieux qu'un Alexander Joel pour révéler toutes ses qualités. Le lyrisme est aux abonnés absents, en mode « routine » à bien considérer les tempi émoussés et quelques pailles inhérentes à une absence d'engagement et de concentration. Le spectateur obtiendra dans l'intermezzo et les murmures du chœur la juste récompense qu'il appelait de ses vœux.

DV