Chroniques

par gérard corneloup

Leonard Slatkin dirige l’Orchestre national de Lyon
œuvres de Chostakovitch, Rouse et Saint-Saëns

Auditorium Maurice Ravel, Lyon
- 15 novembre 2012
Leonard Slatkin dirige l’Orchestre national de Lyon
© anne cusack

Écouté devant une salle plutôt clairsemée – comme c’est (trop) souvent le cas ces dernières saisons –, ce concert est, faute de mieux, l’occasion de clamer bien haut : bravo, l’Orchestre national de Lyon, tous pupitres confondus ! Musiciens et musiciennes ont tous magnifiquement joué, résistant au mieux à une direction surréaliste, assénée par le vénérable maestro russo-américain, récemment nommé à leur tête, qui confond délibérément les grandes fresques de la symphonie pos-romantique française avec les pompes hollywoodiennes. Car, malgré son ampleur, son effectif imposant, son importante partie destinée à l’orgue, en particulier dans le grandiose finale, ses envolées lyriques et son orchestration rayonnante, la Symphonie en ut mineur Op.78 n°3 (avec orgue) de Camille Saint-Saëns, ce n’est ni du Miklós Rózsa, ni du John Williams, ni Wojciech Kilar ni un épigone lointain de John Philip Souza. Pourtant, sous la baguette quasiment militaire, impavide et métronomique de Slatkin, tout est enlevé, envoyé, expédié. Les demi-teintes de l’initial Allegro sont assénées, englouties les subtilités du Poco adagio, les progressions chromatiques précipitées, et ainsi de suite. Bref, ne sont mises en avant, prestement, que les phrases éclatantes et décoratives de cette œuvre de fond qui est tout sauf cela. Heureusement, malgré les décalages des départs, consécutifs à une gestuelle hâtive du coordonateur, cordes comme bois et surtout cuivres arrivent à fournir des franchises d’attaques et des fondus de sonorités qui forcent l’admiration, au niveau de la partie d’orgue bien défendue par Vincent Warnier.

Chostakovitch est mieux gâté par la direction slatkinienne, évidemment dans un style nettement différent que celui dévolu au cher Camille. Très présente, elle obère un rien la présence de la violoniste Viktoria Mullova dans le Concerto en la mineur Op.77 n°1. Mais le jeu serré, concentré, point trop épanoui de la soliste, manquant peut-être d’ampleur, n’arrange pas vraiment les choses.

Finalement, le seul moment réussi, riche et intéressant de la soirée consiste en la découverte d’une pièce écrite en 1981 par le compositeur américain Christopher Rouse et titrée The Infernal Machine. Une machine omniprésente, « phagocytante », angoissante même, quasi vivante et vrombissante qui monopolise, tour à tour, tous les pupitres, tous les registres. Un univers fascinant, fort bien servi – ouf !

GC