Chroniques

par monique parmentier

La lanterne magique de M. Couperin
spectacle de Louise Moaty

Opéra Comique, Paris
- 22 décembre 2010
La lanterne magique de M. Couperin, spectacle de Louise Moaty
© guillaume mousson

Voici un spectacle hors du temps, invitation à un voyage naïf et onirique, qui ramène sur les rives de l’enfance, sans jamais tomber dans la mièvrerie. Après avoir été l’assistante de Benjamin Lazar sur de nombreux spectacles, Louise Moaty signe une merveille de délicatesse avec cette mise en scène. Avec un Rinaldo de Händel qui tourne actuellement et ce concert optique, elle prouve être l’un des jeunes espoirs les plus talentueux et prometteurs de la scène actuelle. La musique de Couperin, tendre et mystérieuse, dialogue avec grâce et raffinement avec les images projetées par la lanterne magique sur un écran rond comme la lune.

Dans la salle éclairée à la bougie où un public extrêmement jeune se mêle à des adultes en soif d’émerveillement, le sortilège agit progressivement. Aux cris de surprises des premiers, répond la compréhension aimante des seconds. Loin de réclamer le silence, tous se retrouvent à ressentir les mêmes émotions que le public des salons des XVIIe et XVIIIe siècles dut éprouver en découvrant cet étrange instrument dont les projections ouvrent un livre d’images s’animant. Des dessins sur plaque de verre, simples et évocateurs, incitent à la contemplation dans Les Bergeries, Les Plaisirs de Saint Germain en Laÿe, Le Dodo ou l'amour au berceau.

On y passe du rire, devant une danse macabre dans un Menuet endiablé ou des tours de prestidigitation, aux larmes lorsque l’amour de maman veille par une berceuse sensible sur le sommeil de son enfant. Les ailes des moulins tournent, l’eau des torrents vagabonde, le soleil se lève et la musique de François Couperin, dont les titres énigmatiques sont ici attribués aux saynètes, convie à se laisser emporter sans a priori vers des destinations irréelles et enchanteresses.

En penseur mélancolique, Bertrand Cuiller (clavecin) nous détache du monde. Son jeu élégant et subtil rend présentes les ombres errantes, dont celle du compositeur. Sa virtuosité permet à la musique d’irradier d’un bonheur fragile mais ô combien vital ! L’harmonie entre le musicien et Louise Moaty font de ce concert un instant de partage d’une amitié rare et précieuse. On ne peut que conseiller au public de se presser pour le découvrir. Programmé par l’Opéra Comique dans le cadre de son très riche festival Cadmus et Hermione, il en est l’un des magnifiques bourgeons, riche en promesse d’avenir tant les enfants s’y avèrent public attentif.

MP