Chroniques

par hervé könig

Il re pastore | Le roi berger
dramma per musica de Wolfgang Amadeus Mozart

Buxton International Festival / Opera House
- 13 juillet 2023
Au Buxton International Festival 2023, "Il re pastore" de Mozart...
© genevieve girling

Au fil des festivals britanniques, une petite révision mozartienne est en route. Avec Mitridate, re di Ponto apprécié à Garsington, dès le début de la balade, et après les très fréquentées Nozze di Figaro à Convent Garden [lire nos chroniques des 2 et 11 juillet 2023], voici le rare Re pastore. En effet, ce dramma per musica en deux actes créé à Salzbourg au printemps 1775, lorsque le compositeur n’avait pas encore atteint sa vingtième année, ne connaît guère les honneurs des scènes d’aujourd’hui, sans pour autant qu’il soit d’une facture indigente. Bizarrement on lui préfère La finta giardiniera, son contemporain munichois, qui pourtant n’a rien pour le distancer.

Une nouvelle fois aux commandes du Northern Chamber Orchestra, Adrian Kelly, patron du Buxton International Festival, s’ingénie à en révéler les qualités nombreuses et à donner à entendre le quintette vocal qui le sert si bien. Depuis le pianoforte, le chef dessine les récitatifs et dirige son monde avec une habileté joueuse. La variété d’expression de sa lecture est un vrai bonheur. La précision et l’efficacité des musiciens sont des atouts de taille pour servir l’ouvrage.

Le décor conçu par Hannah Wolfe cultive la simplicité. Il s’agit d’un plateau nu délimité à l’arrière par un dispositif d’écrans qui diffusent des images de campagne et de bords de mer. Elles ont été filmées au Pays de Galle, dans les Bannau Brycheiniog, et dans le parc naturel de Peak District, tout près d’ici, par Jack Furness qui signe également la mise en scène du Re pastore. Par ce geste, il en affirme le cadre bucolique, ses scènes se déroulant au dehors, dans la proximité d’un berger. Soleil dans les branches, contours de lacs, troupeaux de moutons, landes, torrents et passages de nuages, tout un vocabulaire se déploie, qui se reflète dans le noir brillant du sol. Au préalable de la musique, les haut-parleurs donnent des chants d’oiseaux, ce qui signale encore plus le cadre pastoral. Furness ménage à chaque personnage une expressivité bien construite, que portent des costumes clairement identifiables comme ceux de l’époque de Mozart (signés Hannah Wolfe, également). Les lumières de Jake Wiltshire contribuent à ciseler les corps sur la mise en avant de la nature.

Un quintette de jeunes gens brillants flatte immanquablement l’oreille. Le mezzo-soprano sur-timbré de Katie Coventry sert un berger crédible, Aminta émouvant que nous écouterions des heures s’il le fallait. Dans le rôle d’Elisa, sa gentille bergère, nous retrouvons Ellie Neate, entendue hier dans La sonnambula [lire notre chronique de la veille]. Très présent dans les récitatifs, le soprano fait grand effet dans les airs et dans le beau duo qui clôt le premier acte. Tamiri, la princesse déchue, est confiée à l’explosive Olivia Carrell à travers qui le drame s’enflamme momentanément. Quelle fougue ! Le chant du ténor George Curnow est d’une grâce exquise dans le rôle du noble Agenore. Quand à Joseph Doody, le second ténor de l’affaire, il campe un Alexandre vocalement musclé et d’une intonation bien aiguisée. La réussite est donc complète.

HK