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Chroniques
I puritani | Les puritains
opéra de Vincenzo Bellini
Pour clore sa saison 2015/16, c’est à un monument belcantiste que recoure le Teatro Real. Romantisme oblige, en 1832 l’Italien Carlo Pepoli puisait dans une pièce du Normand Jacques-François Ancelot, mêlée à l’un des innombrables drames historiques de Joseph Xavier Saintine (pseudonyme de Joseph-Xavier Boniface), le sujet du livret qu’il livre à Vincenzo Bellini. Écrit en France, Les puritains voient le jour en janvier 1835, à Paris. La production du Teatro Municipal de Santiago du Chili investit pour quelques soirs la scène madrilène, avec l’enchantement d’une vision plutôt classique de l’ouvrage, sans marcher sur la tête, que signe Emilio Sagi, en honnête homme dont le métier s’affirme dans un esthétisme bienvenu – lumières d’Eduardo Bravo et décors de Daniel Bianco. Sous des lustres qui ne représentent pas l’Angleterre de l’argument tout en situant clairement l’action dans une cour royale, I puritani concentre le mélomane sur le chant – c’est parfait, s’agissant de bel canto !
On ne boudera donc pas son plaisir, puisque de voix, il en est nettement question, grâce à une distribution bien choisie. Nous avons retrouvé avec plaisir le robuste Miklós Sebestyén en Lord Valton, artiste hongrois de plus en plus présent sur la scène internationale [lire nos chroniques du 6 février 2015, du 6 mai 2014 et du 8 juin 2013]. De même le ténor Antonio Lozano, Robertson efficace, et notre bien cher Nicolas Testé, toujours aussi charmant, bien que la partie de Giorgio ne soit guère dans sa voix. Un autre chanteur français fait bel effet sur ce plateau : outre la couleur si personnelle du timbre, de plus en plus ronde, Ludovic Tézier offrait un travail de nuances très ourlé à son Riccardo luxueusement phrasé. Du côté des dames, le fort agile mezzo-soprano Annalisa Stroppa ne démérite pas en Enrichetta, quand Diana Damrau livre en Elvira des vocalises d’une finesse hors du commun, avec un aigu de funambule, objectivement divin.
Enfin, c’est au formidable ténor mexicain Javier Camarena que la salle fait fête, à juste titre. Avec quelle maîtrise technique il négocie un Arturo de rêve ! Émission soigneusement impactée, projection généreuse, exploitation très « artiste » des possibilité de dynamique qu’offre le rôle, tout est là, joint par une souplesse vocale prodigieuse, ce qui autorise des mezza di voce tellement caressants…
À la tête du Coro del Teatro Real, Andrés Máspero signe une brillante prestation (le final !...), à l’instar d’Evelino Pidò qui fait exactement ce que cette musique exige : assurer une fosse d’une fiabilité métrique exemplaire. On ne lui en demande pas plus.
KO