Chroniques

par bertrand bolognesi

Gustav Mahler Jugendorchester
Burkhard Fritz, Thomas Hampson et Philippe Jordan

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
- 5 avril 2011

La vaste tournée du Gustav Mahler Jugendorchester passant par Paris, l’on se réjouit de pouvoir entendre cette formation rendre hommage à celui dont elle porte le nom, et sous la battue du directeur musical de notre opéra. Pourtant, dès les premières mesures de l’Adagio de laSymphonie en fa # mineur n°10, force sera de constater que l’illustre phalange ne bénéficie pas, à chacune de ses diverses moutures, d’un même bonheur. Ainsi l’écoute rencontre-t-elle ce soir des cordes approximatives, des bois anémiés, et quand bien même l’éclat des cuivres ne se pourrait mettre en doute, à lui seul il ne saurait porter dignement l’exécution. L’on aurait pu penser qu’à confier ces jeunes musiciens à un chef de trente-six ans dont on connaît l’enthousiasme et le dynamisme, le résultat fût forcément probant. Il n’en est rien : tout au contraire l’interprétation de l’Adagio paraît-elle laborieuse et empesé dans un grand déploiement du son, exagérément démonstratif, jusqu’à noyer tout relief.

Du Lied von der Erde, véritable Dixième, au fond, et achevée, celle-ci, quoique créée après la disparition de Gustav Mahler, l’on n’apprécie guère, après l’entracte, une version terne, sans couleur, paradoxalement peu vigoureuse, voire sans esprit. Aussi faut-il attendre l’ultime Abschied pour rencontrer quelque chose qui pourrait bien ressembler à un choix interprétatif. Car auparavant, le ténor Burkhard Fritz, certes vaillant, accuse des attaques maladroites et malmène plus d’une fois le phrasé. Sans doute l’artiste subit-il aujourd’hui une passagère méforme, ce qui expliquerait le peu de stabilité dont souffre sa prestation, comme l’engagement minimum à servir un texte qui en demande plus.

C’est donc à l’immense mahlérien qu’est Thomas Hampson qu’il revient de rehausser le niveau, si l’on peut dire, à travers un Abschied d’une grande classe, jamais appuyé, tout en réserve, enfin servi par un Philippe Jordan plus soucieux du détail qui retrouve la rigueur qu’on lui sied.Une discrète expressivité surgit peu à peu, laissant finalement l’auditeur sur une (presque) bonne impression.

BB