Chroniques

par laurent bergnach

Gianni Schicchi
opéra de Giacomo Puccini

Théâtre, Châtillon
- 11 mars 2010
Gianni Schicchi, opéra de Giacomo Puccini par la compagie l'Orphée Théâtre
© orphée théâtre

« Après le sombre Tabarro, écrit Giacomo Puccini à son librettiste Giovacchino Forzano, je sens le désir de m'amuser. » S'inspirant de Dante (Divina Commedia, 1472) et de Ben Jonson (Volpone, 1606), Gianni Schicchi clôt sur un ton de farce l'hétéroclite Il Trittico, créé le 14 décembre 1918 – à New York, puisque l'Italie se relevait péniblement de la guerre. Au grand désespoir de son créateur, l'opéra devient si populaire qu'on le jouera souvent seul ou, pire encore, précédé d'autres œuvres que celles en un acte prévues à l'origine.

Pour raconter l'histoire de ces héritiers tombant sur plus malhonnêtes qu'eux, les membres de l'Orphée Théâtre ont opté pour des marionnettes manipulées à vues par les chanteurs, lesquelles sont très caractérisées : celle-ci se déplace dans un chaudron, celle-là possède un tonneau en guise de tronc, et ces autres, encore, n'ont pas de bras mais des ailes… Metteur en scène et scénographe, Jean-Michel Fournereau explique :

« Quand nous rêvons à notre Gianni, se bousculent dans notre imaginaire tableaux de Bosch et de Caravaggio, créatures à la Tim Burton ou Tex Avery, des gueules et des ambiances à la Tontons flingueurs et une certaine poésie macabre où un jeune enfant joue près du lit d'un cadavre et découvre fasciné : vie et mort, cupidité et générosité, intelligence et bêtise, tromperies en tous genres […] ».

Introduite par quelques couplets sur l'héritage et la mort sur fond d'accordéon (dont le fameux Tango funèbre de Brel), cette production laisse bientôt nos jeunes chanteurs, en formation à Paris et Marseille, aux prises avec l'ouvrage de Puccini. Aucun ne démérite vraiment, même si les qualités de certains sont évidentes : vaillance de Loïc Gugen (rôle-titre), timbre chaleureux de Cyrille Dubois (Rinuccio), force délicate de Sabine Devieilhe (Lauretta) et articulation soignée de Frédéric Madec (Simone).

Malgré quelques inconvénients (bruits de certains pantins à roulettes sur le dallage en bois) ou déceptions (scène du notaire bien sage), ce spectacle possède beaucoup d'atouts dont une fluidité étonnante, au vu du nombre de participants et de leurs déplacements, et un accompagnement nuancé, fruit du pianiste Alphonse Cemin.

LB