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Chroniques
Donaueschinger Musiktage 2019 – épisode 5
créations de Jürg Frey, Saed Haddad, Eva Reiter et Lidia Zieliñska
Retour à la Baar-Sporthalle pour le dernier concert de l’édition 2019 des Donaueschinger Musiktage, qui réunit le Südwestrundfunk Sinfonieorchester et le Deustcher Kammerchor. Pour commencer, Wächter d’Eva Reiter, compositrice autrichienne (née à Vienne, en 1976) qui poursuit également une carrière d’instrumentiste, ce dont témoigne d’ailleurs sa nouvelle pièce où elle intervient à la flûte Paetzold avec Susanne Fröhlich, la partie de flûte « normale » étant tenue par Mike Schmid. Une étonnante fresque sonore de tuyaux se joue sous nos yeux, dans l’aura imposante des choristes donnant une longue section de notes tenues qui se relaient. Un passage de percussions prend la suite, puis les voix reviennent, sorte de phonèmes poussées en glissando. Depuis les tubes blancs, les souffles se projettent en un bourdonnement d’usine, avec les notes prolongées du chœur, tout cela ponctué par des inserts percussifs et les attaques amplifiées des flûtes basses. Ce sont finalement les flûtes qui prennent le devant de la scène. Cette pièce dont l’exécution implique un aspect visuel fort est chaleureusement accueillie par le public.
La compositrice polonaise Lidia Zielińska (née en 1953, à Poznań) est, elle aussi, instrumentiste, puisqu’elle s’est produite en tant que violoniste au sein de plusieurs orchestres de son pays. D’elle nous découvrons Klangor sous la battue de l’excellent Tito Ceccherini, une commande conjointe de la chaîne radiophonique allemande et de l’Instytut Adama Mickiewicza de Varsovie. Cette œuvre utilise un grand effectif reconsidéré dans l’espace, pour une espèce de thrène énigmatique et tendu dont le travail des timbres paraît directement provenir de l’expérience de la musique électronique. Une belle part est accordée à la percussion et aux cuivres. Cela s’achève dans une montée progressive, comme un envol délicat et prédestiné.
Avec Melancholie pour harmonica chromatique et orchestre, Saed Haddad (né en 1972, en Jordanie) aborde le sang versé, la guerre, la religion et la mort dans le monde arabe en catastrophe. À la soliste Hermine Deurloo est dévolue une ligne mélodique fragmentée qui dialogue souvent avec le hautbois, dans une esthétique personnelle qui procède par longues plages stationnaires, presque extatiques. Cette page d’une douzaine de minutes montre un compositeur inclassable, en dehors des courants. Quant à lui, Jürg Frey est né en 1953 à Aarau, dans le Jura Suisse. Compositeur très prolifique (plus de deux cent cinquante opus), il est également un clarinettiste renommé qui enseigne son instrument au plus haut niveau. Elemental realities a beaucoup surpris, mais pas d’une bonne manière ! Cette pièce beaucoup trop longue (près de quarante minutes) est caractérisée par un statisme assommant, une proposition harmonique rétrograde, une répétitivité ennuyeuse – Il y a une logique certaine dans la programmation de cette année, dont le premier concert commençait par un soundtrack indigent de Matthew Shlomowitz !
AO