Chroniques

par laurent bergnach

concert Émilie Simon
avec les Percussions Claviers de Lyon

Salle Pleyel, Paris
- 15 septembre 2007
concert Émilie Simon avec les Percussions Claviers de Lyon
© dr

En moins de cinq ans, avec trois albums studio dont une bande originale de film (La Marche de l'empereur), Émilie Simon semble s'être fait une place définitive dans le monde de l'électro-pop français. En effet, auteure, compositrice et interprète née en 1978, la jeune femme fait preuve d'une certaine maturité artistique, au point qu'on a souvent écrit qu'elle suivait les traces d'illustres aînées telles Kate Bush et Björk, qui ont marqué une décennie chacune avec leurs recherches sonores. Si la première n'est parue sur scène qu'épisodiquement, si la rumeur veut que la seconde s'y montre souvent décevante, Émilie Simon multiplie les retrouvailles avec le public de sa génération et, comme c'est le cas avec les deux rendez-vous du jour (16h et 20h), on imagine facilement qu'elles sont toutes de qualité.

Faisant vibrer des bols tibétains durant leur entrée par les allées de Pleyel, les musiciens s'installent derrières leurs instruments. Cinq d'entre eux appartiennent aux Percussions Claviers de Lyon [lire notre chronique du 14 mars 2006], soit Raphaël Aggery, Sylvie Aubelle, Gilles Demoulin, Gérard Lecointe et Henri-Charles Caget qui a réalisé les présents arrangements. On entend bientôt le bois du marimba, une lame métallique caressée par l'archer, les sons flûtés du violoncelle tenu par Arnaud Crozatier… C'est parti pour une vingtaine de chansons – avec un intermède pour le changement de robe – aux couleurs tantôt tribales, tantôt scintillantes, faisant intervenir avec discrétion un accordéon, un saxophone ou la guitare servant à une version folk de Fleur de saison. Utilisée pour l'intro' de Swimming, la vasque d'eau agitée symbolise les passerelles tissées entre un univers gothique à la Tim Burton – lui-même influencé par Edgar A. Poe et l'illustrateur Edward Gorey – et les sons d'aujourd'hui – détentrice d'un DEA en musique contemporaine, Émilie Simon confie à Cyrille Brissot (de l'Ircam) le soin du traitement électronique du concert.

Femme-enfant de façade qui séduit par l'impact d'une voix souple et chaude, au grave présent, à l'aigu musclé – il y a derrière des années de chant lyrique étudié à Montpellier –, la créatrice se révèle une perfectionniste à l'affût du dosage exact. Les mélodies carrées ont retenu la leçon gainsbourienne (flagrant sur Rose hybride de thé), l'écran tendu en fond de scène est sobrement utilisée, la prestation s'avère incarnée sans être racoleuse. Si l'ensemble paraît parfois trop maîtrisé, Émilie Simon a l'indéniable pouvoir de guider un public populaire vers une musique sophistiquée, comme sur My old friend, où son arbre-piano résonne sous les baguettes des cinq percussionnistes.

LB