Chroniques

par marc develey

Collegium Vocale Gent
Bach et Buxtehude par Philippe Herreweghe

Les Grands Concerts Sacrés / Église Saint-Roch, Paris
- 22 février 2006
Cantates de Baxch et Buxtehude par Philippe Herreweghe, à Paris
© michiel hendryckx

Ce sont cinq cantates d'affliction de Johann Sebastian Bach (catalogue BWV) et Dietrich Buxtehude (catalogue BuxWV) que Philippe Herreweghe propose, en l'Église Saint-Roch. Cinq Cantates pour pleurer la faiblesse du croyant face au péché – telles les BWV 135 : Ach Herr, mich armen Süden ou BWV 199 : Mein Herz schwimmt im Blut –, chanter sa crainte du Juge terrible et de son pouvoir de rétribution – BWV 46 : Schauet doch und sehet, ob irgend ein Schmerz sei –, et toujours glorifier en Jésus le pacificateur, et du Père courroucé, et du cœur dolent du pécheur – les BWV 101 et BuxWV 78, toutes deux sur le choral de Martin Moller, Nimm von uns, Herr, du treuer Gott.

Le Chœur et l’Orchestre Collegium Vocale de Gand y font merveille. Homogénéité des voix, finesse des qualités expressives (par exemple du lamento en imitation dans le Choral d'ouverture de la BWV 46), parties concertantes avec les solistes – on songe à l'ensemble de flûtes et hautbois da caccia de l'air d'alto, Doch Jesu will auch bei der Strafe (même cantate). La grande retenue des contrepoints aux harmonies complexes (motet d'ouverture de la BWV 101) le dispute à la brillante italianité de certains airs – Warum wilst du so zornig sein (la même) – et à la sobriété recueillie des chorals.

Carolyn Sampsonsert la Cantate BWV 199 (pour soprano solo) d'une voix ample et lumineuse, à la mesure de la ferveur du texte (l’air Wie freudig ist mein Herz), et d'une diction très bellement dramatique dans les récitatifs. Sur sa partie d'alto, Ingeborg Danz offre un chant tout en finesse, d'une grande sobriété. Le ténor Jan Kobow convainc dans les récitatifs ; d'une belle netteté, sa voix connaît néanmoins çà et là quelques défauts de projection, sans pour autant nuire à la grande qualité expressive de son chant. Peter Kooij, quant à lui, donne aux arie de basse son timbre élégant, un peu serré peut-être dans le registre grave et accusant un vibrato parfois légèrement trop marqué pour les résonances de l'église, mais d'une belle prestance.

Nous retiendrons précieusement la splendide et rare Cantate BuxWV 78 de Buxtehude où chœur et orchestre font entendre, dans une partition complexe traversée de tuilages hiératiques, de chromatismes et d'imitations savantes, une piété discrète dans la supplique et un art achevé dans l'exécution.

MD