Chroniques

par gérard corneloup

Collegium 1704 dirigé par Václav Luks
Jan Dismas Zelenka | Officium defunctorum

Festival de La Chaise-Dieu / Abbatiale
- 22 août 2009
Markéta Cukrová chante Zelenka au Festival de La Chaise-Dieu
© dr

Dans le maelström culturel, tant musical qu'architectural, qu'était la Dresde façonnée par l’Électeur princier Auguste II de Saxe dans la première moitié des Lumière, le nom de Jan Dismas Zelenka, musicien bohémien venu s'installer dans la prestigieuse cité alors qualifiée de Florence sur l'Elbe, brillait d'un éclat tout particulier – gloire aujourd'hui sinon éteinte du moins singulièrement en veilleuse pour ce contemporain de Bach qui composa près de deux cent cinquante partitions rarement reprises de nos jours. C'est dire l'intérêt de la soirée que le Festival de la Chaise-Dieu consacre au compositeur, parmi les premières de son édition 2009 et centrée sur l'une des partitions les moins oubliées de Zelenka : le Requiem composé pour les obsèques de son prince et protecteur, justement.

En réalité, la (longue) soirée associe au Requiem lui-même une large partie des diverses pièces tant vocales que sacrées, à l'origine disséminées tout au long des cinq jours (pas un de moins !) que durèrent les cérémonies funèbres, avec le faste que l'on imagine. Maître d'œuvre de cette exhumation, le chef Václav Luks rappelle fort justement l'ampleur de la chose en écrivant dans son texte de présentation « grâce à la double confession de l'union – catholique ainsi que protestante –, les cérémonies sont devenues très compliquées et longues ». Le mélomane présent sous les voutes de la fameuse abbaye bénédictine du Livradois ne peut que témoigner de la chose, même si lui fut offerte une partie seulement des multiples séquences de cet Officium defunctorum où alternent parties concertantes et psaumes grégoriens.

Le moment le plus intéressant concentre indéniablement au sein du Requiem, lequel suit rigoureusement les canons en la matière, cultivant l'anatole volontiers répétitive, l'harmonie sans problème et sans risques, avec recours obligé aux cuivres et aux percussions pour le Dies iræ. Du moins cette œuvre (pas vraiment impérissable) bénéficie-t-elle ici d'une interprétation aussi vivante que cohérente : celle d'une belle brochette de jeunes solistes fort à l'aise dans ce répertoire – en particulier l'alto Markéta Cukrová [photo] et la basse Tomáš Král –, celle des chanteurs et musiciens de Collegium 1704. Bien pétri, le tout s’avère avantageusement amalgamé, façonné par la direction un rien virevoltante mais fort « mobilisante » de Václav Luks.

Quelques soirs plus tôt, la même équipe donnait une exécution toute aussi convaincante d'une partition autrement riche et novatrice, quoique l'une des premières composées par Georg Friedrich Händel : l'oratorio La Resurezione, exécuté en l'Abbatiale juste après l'avoir été en l'Église de Vézelay [lire notre chronique du 20 août 2009]. Sous la direction tout aussi vibrionnante du maestro tchèque, restant peut-être trop souvent dans l'instant, c'était l'occasion de savourer la musicalité, l'expressivité et la voix bien timbrée du soprano Kateřina Kněžíková dans le rôle de Marie-Madeleine.

GC