Chroniques

par bertrand bolognesi

Christophe Rousset et Les Talens Lyriques
œuvres de CPE et JS Bach, Händel

Opéra national de Montpellier / Corum
- 9 avril 2003
Christophe Rousset photographié par Ignacio Barrios Martinez
© ignacio barrios martinez

La résidence des Talens Lyriques vaut à la ville de Montpellier des concerts de grande qualité, comme c’est le cas ce soir. Nous retrouvons le soliste qu’est également Christophe Rousset dans le Concerto en ut mineur pour clavecin et orchestre Wq 37 de Carl Philip Emmanuel Bach dont surprend la violence de caractère, dès les premières mesures de l’Allegro. L’interprétation accentue farouchement les attaques, leur donnant une vive rudesse assez mordante. Au clavecin Rousset articule un Andante arioso d’une grande élégance, affirmant une fois de plus l’inexorable précision de son jeu. Le Presto est donné dans une fulgurance étonnante.

Le concert s’était ouvert avec la Suite de danses extraite de l’opéra Il pastor fido de Georg Friedrich Händel. L’avantage de la présente lecture est de se garder précautionneusement de quelque pompe que ce soit, ce qui pourtant est tentant sur l’Ouverture. Au contraire, les mouvements en sont enchaînés dans une égale vivacité. La Bourrée, donnée piano, prend une allure différente. La Gigue brille alors plus par sa recherche dans la sonorité que par l’attendu caractère « enjoué » de son mouvement. Les attaques s’avèrent contrastées sans exagération, dans une saine dynamique.

L’épisode Pour les chasseurs est joué si rapidement qu’on y croise de cette hystérie particulière aux opéras du Grand Saxon. De même la Sarabande n’est-elle pas trop lente, ni trop assombrie par un choix dans les équilibres instrumentaux qui pourrait amener quelque chose de plus sombre ; elle continue d’avancer, danse avant toute chose, elle aussi. Signalons également un fort beau passage de tutti, juste avant le solo de hautbois, joué mezzo piano strictement observé d’une grande finesse et relativement difficile à tenir ainsi sur la durée. Enfin, les musiciens et leur chef accentuent, dans leur enthousiasme, la possible agressivité de la Gavotte finale. C’est une version d’une grande unité qu’ils livrent.

La seconde partie de ce concert propose la Suite en ut majeur BWV 1066 de Johann Sebastian Bach. Nous y observons un premier violon quelque peu trop zélé et, de ce fait, parfois en dehors de l’unité sonore de l’ensemble. Ce peut être d’autant gênant qu’il n’est pas toujours exactement juste. En général, cette pièce est donnée dans un mouvement allant sans jamais s’appesantir. Elle montre à son avantage un pupitre de vents à toute épreuve.

Enfin, ce beau moment s’achève dans la célèbre Water Music de Händel dont nous écoutions la Suite en fa majeur HWV 348 (n°1) dans une interprétation avantageusement nuancée. Notons un solo de hautbois d’une rare perfection dans la Bourrée.

BB