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Chroniques
atelier-concert(s) Cursus 1
quatorze créations d'élèves
Comme la saison passée, ils sont quatorze étudiants à être venus suivre la formation pratique à l’informatique musicale proposée par l’Ircam, une année durant, après leur sélection par un jury de professionnels en phase avec leur époque. Âgés de vingt-neuf à trente-six ans, venus d’une dizaine de pays différents, plusieurs ont en commun l’enseignement de Michael Jarrell et de Luis Naón à la Haute École de Musique de Genève – deux noms qui émergent d’une liste de compositeurs-enseignants aussi variés qu’André, Cohen, Czernowin, Féron, Gadenstätter, Gaussin, Gervasoni, Havel, Heininen, Hervé, Jarrell, Kühr, Leroux, Louvier, Murail, Naón, Nevanlinna, Parra, Pepi-Alos, Posadas, Puumala, Sciarrino, Solovera, Sotelo, Stroppa, Tutschku et Walter.
Une première impression se dégage du concert initial, commenté comme le suivant par Andrew Gerzso (directeur du département Pédagogie et action culturelle de l’institution) : de manière décomplexée, certains laissent filtrer dans leur production de fin d’année un goût pour la musique populaire (hard rock, jazz), et d’autres la nostalgie de leur pays natal. Nous aimons particulièrement Théorème R du Chilien Pablo Galaz, pièce vocale inspirée par les prospections mathématiques de Raymond Roussel, dont le côté foisonnant trahit la nature d’étude ; Drifting […mirages~] du Dijonnais Pierre Stordeur, composition d’un passionné des tempéraments égaux non-octaviants qui, à l’aide d’un alto et de six gongs reliés à l’ordinateur, offre diverses auras métalliques ; ainsi qu’Après tel février de la Finlandaise Maija Hynninen, un travail à souligner sur la craquelure et la fêlure, même si les recherches vocales annoncées paraissent bien pauvrettes…. En revanche, nous apprécions moins El Afilador du Mexicain Antonio Juan-Marcos (évocation de l’affuteur de couteau local, hypnotique mais peu convaincante), Sunbathing du natif de Saint-Cloud Blaise Ubaldini (un chant bavard et une bande-son omniprésente plutôt neutre, où tout est donné d’emblé) et ecce Saturnus (anti-Cronia) de l’Espagnol Germán Alonso (opus avec saxophone « distordu » qui s’inscrit dans la lignée de la saturation chère aux nouveaux piliers de l’Ircam et ravive ces peintures noires de Goya qui inspirèrent Alberto Posadas [lire notre critique du 19 juin 2009], l’un des professeurs de l’apprenti créateur).
Du second rendez-vous, nous retenons Red harsh… de l’Espagnole Núria Giménez Comas [photo], reposant sur un violon nuancé qui n’étouffe pas sous ses propres échos retravaillés avec maîtrise ; Camélia clou(t)é de la Sud-Coréenne Sua Seo, avec sa volonté d’énergie cachée puis libérée qui s’empare des souffles de l’accordéon accompagnés d’effets de plaques vibrantes, pour un résultat enthousiasmant ; Bêtes de Sexe du Croate Davor Branimir Vincze, une jungle mystérieuse remplie de cris hybrides, générée avec humour – et même délicatesse – par ce médecin de formation ; Three Steps du Canadien Geof Holbrook, page au climat étrange et tendre portée par un saxophone qui laisse perler des accords de piano jouet ; Frequencies of Metal de l’Espagnol Javier Elipe Gimeno, triptyque pour tuba sans prétention, qui nécessite parfois le choc d’une paume contre l’embouchure ; ainsi que Logo du Finlandais Sampo Haapamäki, conception pour violon virtuose qui ne manque pas de légèreté malgré une certaine nervosité – et laisse toute sa place à la clochette tibétaine attendue ! Quelques propositions ont moins touché, telles Don de l’Italien Gabriele Vanoni (une bande-son prosaïque qui perturbe l’écoute du soprano baudelairien, durant la première partie tout au moins) et Perfondo du Colombien Juan Camilo Hernández Sánchez (exploration des caractéristiques du tuba dans une redondance métallique désolante, sans pensée véritable).
Ces créations n’auraient pas eu lieu sans la participation des élèves du CNSM de Paris, soient les chanteuses Elsa Dreisig, Tatiana Probst (sopranos), Anaïs Bertrand, Claire Peron (mezzos) – c’est peu dire que la voix masculine n’est pas à l’honneur de cette promotion… – et les instrumentistes Raphaël Martin, Tancrède Cymerman, Florian Schuegraf (tuba), Carl-Emmanuel Fisbach, Hiroe Yasui (saxophone), Constance Ronzatti, Eun Joo Lee (violon), Marie Ythier (violoncelle), Noémie Bialobroda (alto) et Fanny Vicens (accordéon).
LB