Chroniques

par samuel moreau

récital Charles Daniels
mélodies avec luth

1 CD Atma Classique (2007)
ACD2 2548
récital Charles Daniels | mélodies avec luth (XVIe – XVIIe)

Dans une Angleterre prospère qui profite de la paix, la musique vocale profane prend un essor remarquable dans la dernière décennie du XVIe siècle. Le madrigal, la canzonetta ainsi que le ballet, issus de la Renaissance italienne, inspirent les compositeurs britanniques, pour le plus grand plaisir d'une noblesse et d'une bourgeoisie en demande d'adaptation à la langue et à la poésie locale. Parallèlement, se développent le consort song (une voix soliste se mêle à une polyphonie de violes) et le lute song, décrit par Henry de Rouville comme « une miniature pour voix et luth, dont l'accompagnement créé l'atmosphère, de la tendresse pastorale à l'amour malheureux ». Tandis que les titres de recueils donnent le choix entre divers instruments (viole, luth, etc.), ce dernier fini par trouver ses lettres de noblesse, notamment grâce à des personnalités comme John Dowland. Pour de tels duos, la mise en valeur du dessin rythmique de la voix, la recherche de la perfection de la forme et de l'élégance d'expression sont les buts à atteindre.

Le présent enregistrement regroupe huit compositeurs – Corkine, Ferrabosco, Ford, Jones, Pilkington, Rosseter, etc. –, mais arrêtons-nous sur Thomas Morley (1557-1602), le plus joué ici, bien qu'il ne soit pas aussi représentatif du lute song que le prolixe Thomas Campion (1557-1620). Bachelier d'Oxford, ce natif de Londres est tout à la fois organiste et théoricien, ami de Shakespeare et élève de William Byrd dont il reprend le privilège pour imprimer de la musique. Tandis qu'il édite un recueil de madrigaux à la gloire d'Elisabeth I (The Triumphes of Oriana, 1601), il veille à ne pas négliger sa propre production, soit plusieurs livres de madrigaux, canzonettes et ballets, de deux à six voix, et un traité (A Plaine and Easie Introduction to Practicall Musicke,1597).

Charles Daniel est un ténor que l'on retrouve régulièrement en concert ou au disque (plus de quatre-vingt enregistrements à son actif). Son timbre un peu rocailleux convient à merveille puisque le chanteur ne cherche pas à faire classique mais, au contraire, à servir la veine populaire convoquée ici (« Mes pensées égrillardes ont attiré mes yeux / À voir ce qui était défendu »). Pour avoir travaillé le luth principalement en autodidacte, Nigel North n'en est pas moins un accompagnateur efficace.

SM