Chroniques

par bertrand bolognesi

Frédéric Chopin
Concerto pour piano n°1 – pièces pour piano

1 CD Harmonia Mundi (2006)
HMU 907402
Frédéric Chopin | Concerto pour piano n°1 – etc.

Tout ne commence pas aussi bien qu'on l'avait rêvé, dans ce disque consacré àChopin. En effet, à la tête de l'Orchestre Philharmonique de Varsovie, Antoni Wit livre une version relativement brumeuse du Concerto en mi mineur Op.11 n°1 qu'il ouvre avec une lourdeur plus qu'appuyée. Par la suite, il en cisèle un peu plus clairement les échanges entre pupitres, dans une lecture toute beethovenienne. Mais, dans l'ensemble, le résultat demeure épais, brutal et sans tonicité, parfois même sourd.

Heureusement, après cinq minutes, le piano fait son entrée. À l'Allegro maestoso Olga Kern ménage un legato d'une tendresse remarquable, une articulation lovée dans une pâte caressante, et réserve aux vocalises plus futiles de l'aigu une accentuation plus soutenue. C'est dans une exquise délicatesse qu'elle amorce le retour du thème, avant de s'engager avec plus de muscle que jamais dans la faconde qui suit.

Pourtant, à la décharge de la pianiste comme du chef, il semble que cet enregistrement n'avantage pas le rendu général, sa couleur générale noyant sous les graves la lumière possible de ce Concerto, sans traduire la nécessaire sensation d'espace au son transmis. L'on écoute ce CD chez soi, et l'on ne reconnait pas les qualités habituelles de l'équipement Hi-fi ; on tente l'expérience chez des amis, puis sur un baladeur, l'intrusion d'écouteurs promettant une approche plus intime : rien n'y fait, le son reste sans dynamique, les instruments désespérément loin.

Dans ces conditions, il serait hasardeux de commenter plus avant l'interprétation d'Olga Kern. À la suite du Concerto, pourtant, quatre pièces pour piano seul attirent notre attention, confirmant l'impression évoquée précédemment. Et il se trouve que leur prise de son s'est faite dans un autre studio ! Cette fois, nous reconnaissons les grandes qualités de la pianiste russe, dès la Fantaisie en fa mineur Op.49 qu'elle amène de très loin, dans un recueillement qui n'en rendra que plus dramatiques les volutes suivantes. On saluera l'esprit qui habite sa lecture du Bolero Op.19, dont les véloces appoggiatures se font ici délicieuses élucubrations colorature. Fluidité et orchestration sont au rendez-vous dans la Fantaisie-Impromptu Op.66, révélant sa mélodie dans une éclaircie fragile bientôt reprise en un dolcississimo d'une sensibilité indicible. C'est par la plus célèbre des Polonaises que s'achève ce petit récital, la Polonaise en la bémol majeur Op.53, donnée avec le brio attendu, sans que jamais l'artiste force le trait.

BB