Chroniques

par bertrand bolognesi

récital Sergeï Levitin

Théâtre du Châtelet, Paris
- 28 mars 2003

C'est un violon d'une capiteuse sonorité qu'offre Sergeï Levitin au public des Midis musicaux du Châtelet, pour clore une Semaine à Saint-Pétersbourg. On eut plusieurs fois l'occasion d'entendre cet artiste, puisqu'il est, entre autre, violon solo de l'Orchestre du Théâtre Mariinski. À ce titre, nous évoquons par ailleurs sa prestation dans Shéhérazade avec cette formation et Valery Gergiev [lire notre critique du CD].

Le programme d'aujourd'hui réunit plusieurs pages virtuoses.
Pour commencer, une sonate du très peu joué Ivan Khandochkine (1747-1804), à la facture classique déjà préromantique. On apprécie le jeu avantageusement nuancé du violoniste, son articulation parfaite, des phrases joliment menées, préservant comme un joyau une saine ampleur du son, ne confondant pas jouer piano et détimbrer lâchement. Le très bref Minuetto grazioso est donné avec charme et élégance.

Rejoint par le pianiste Peter Laul, jeune artiste russe de vingt-six ans déjà professeur au conservatoire de Saint-Pétersbourg, sa ville natale, Sergeï Levitin joue ensuite la Sonate en sol majeur Op.30 n°3 de Beethoven. On goûte un jeu des plus précis et une sonorité infiniment contenue du pianiste pour cette lecture presque schubertienne de Beethoven. Leur interprétation brille d’un certain humour, d’une étonnante vivacité et d’une palette expressive savamment dosée.

Ce moment de musique se poursuit avec un Rondino Op.32 n°2 d’Henry Vieuxtemps. Avouons que l'on comprend mal l'apparition dans un programme jusqu'alors intéressant d'une œuvrette au style si bêtement virtuose ; si le violoniste belge enseigna un temps à Saint-Pétersbourg, cela ne suffit pas à rendre sonécriture digne de figurer ici. Les effets en sont affreusement attendus, n’autorisant que de futiles performances.

La Fantaise autour de « Rousslan et Ludmila » de Viniamin Sher, qui développe de grandes phrases d'une suavité originale, peut paraître un brin complaisante, mais ne s'apparente d'aucune sorte avec la vulgarité de la page précédente. On est frappé par l'inventivité et la faculté d'adaptation d'un style à un autre de Peter Laul qu'on espère entendre prochainement en récital seul. Merci pour Prokofiev en bis...

BB