Chroniques

par gérard corneloup

Mozart par Sophie Karthäuser et Cédric Tiberghien
Nicolas Chalvin dirige l’Orchestre des Pays de Savoie

Salle Rameau, Lyon
- 21 mai 2014
le chef Nicolas Chalvin photographié par Bernard Martinez
© bernard martinez

Depuis 1950, la vénérable Société de Musique de Chambre de Lyon illustre et défend ce répertoire, invitant fréquemment les grands noms en la matière. Depuis quelques années, elle est heureusement prise en main par le directeur artistique Éric Desnoues, par ailleurs toujours acteur de la musique baroque en terre lyonnaise, sous les voûtes de la resplendissante Chapelle de la Trinité.

Mozart au programme, donc, via l’une de ses symphonies, l’un de ses concerti pour piano et quelques-unes de ses arie, mais Mozart joué par un effectif conservant l’esprit et l’équilibre de l’époque, avec toutefois cette singulière particularité choisie par le chef : un morcellement des quatre mouvements de la Symphonie en si bémol majeur K.319 n°33 (1779) en séquences instrumentales au fil desquelles s’encastrent, si l’on ose dire, le Concerto pour piano en sol majeur K.453 n°17 (1884) et les susdites arie – une curieuse démarche, qui peut choquer bien des mélomanes parlant volontiers de « découpage à la tronçonneuse », et qui enlève, il est vrai, bien de la cohésion au discours mozartien. Du moins la soirée est-elle l’occasion de savourer une direction, de confirmer et de savourer une interprétation… au delà d’une présence vocale qui partage l’auditeur entre saveur, justement, et réserves.

Premier atout : la direction de Nicolas Chalvin [photo], à la fois généreuse et précise, attentive et subtile, fluide et bien équilibrée. On se surprend à rêver des quatre mouvements retrouvant leur complicité d’origine… Deuxième atout : la qualité d’ensemble mais aussi par pupitres, que possède l’Orchestre des Pays de Savoie, sous une « férule » aussi motivante. Avec ses bois clairs, ses cordes fusionnelles et ses cuivres en bonne santé, la formation confirme sa place de choix en la matière. Troisième atout : la prestation du pianiste Cédric Tiberghien, toujours aussi à l’aise dans ce répertoire, équilibrant à merveille les plans sonores, faisant chanter les passages lyriques, ciselant à merveille les cadences.

À la voix sont associées des pages moins connues : le secondaire et développé récitatif de jeunesse A Berenice K.70, l’air allemand Nehmt meinen Dank ihr holden Gönner K.383, composé en 1782, enfin une scène dramatique pour soprano et piano obligé, tiré de l’opéra Idomeneo (1786). On aimerait ajouter pleinement dans la rubrique atout la prestation vocale du jeune soprano Sophie Karthäuser, très à l’aise scéniquement, mais ce n’est que partiellement le cas : la musicalité des demi-teintes et la souplesse du phrasé, du moins dans le mezza voce, sont altérés par la dureté d’aigus acides, coupants et détimbrés. Bref, une soirée pas comme les autres, instrumentalement superbe.

GC