Chroniques

par bertrand bolognesi

création de Les mots de Marco-Antonio Pérez-Ramirez
Geoffroy Jourdain dirige le Jeune Chœur de Paris

Roland Hayrabedian dirige le Nederlands Kammerkoor
Tenso Days et Biennale d'Art Vocal / Cité de la musique, Paris
- 1er juin 2007

Ce premier rendez-vous des Tenso Days réunit deux des formations fondatrices du programme Tenso, instauré en 2005 : le Nederlands Kammerkoor et le Jeune Chœur de Paris. Mâtinant des pages du grand répertoire choral à celle que lui écrivent les compositeurs d’aujourd’hui, ces journées feront entendre Stimmen-Engführung de Klaas De Vries, Légende de la femme emmurée d’Eriks Ešenvalds, Im Gestein de Robert Heppener, Saline de Sante Ratniece, Le temps scintille de Martinš Vilums, en créations françaises, ainsi que Laudate pueri de Guillaume Connesson, Sauve-moi de Morgan Jourdan et Anteterrae de Valerio Sannicandro en créations mondiales. À leurs côtés, des œuvres contemporaines signées Pierre-Philippe Bauzin, Maija Einfelde, Philippe Fénelon, Jonathan Harvey, André Jolivet, Philippe Manoury, Bruno Mantovani, Olivier Messiaen et Péteris Vasks, ainsi que quelques aînés, comme Joseph-Guy Ropartz.

Le Nederlands Kammerkoor, dirigé par Roland Hayrabedian, crée ce soir les Drie Mallarmé liederen, composés par Peter-Jan Wagemans – on ne s’étonnera pas d’une forte présence hollandaise, dans un festival qui met à l’honneur les Pays Bas. Rigueur et précision sont mises au service d’une partition explorant autant les ressources de la vibration affirmée que celles de l’onomatopée ou de l’émission bouches-fermées. Écrit en 2005 par Edith Canat de Chizy, Dios bénéficie également d’une exécution irréprochable. L’interprétation d’Orpheus Behind the Wire de Hans Werner Henze (1981-1983) impose sa présence par l’équilibre remarquable du tutti et la définition exemplaire de chaque timbre. Les chanteurs servent idéalement le texte anglais (Edward Bond), tout au long d’une réalisation soignée – « I lost Eurydice » inoubliable, des voix masculines.

Geoffroy Jourdain conduit le Jeune Chœur de Paris dans une première partie conçue comme un voyage à travers la poésie française. Après que les Deux chansons de Charles d’Orléans de Debussy (1898) aient délicatement posé le paysage, assez pauvrement complétées par les Quatre chansons anciennes de Reynaldo Hahn (1907) qui rivalisent d’élégance mièvre, le Tombeau de Louise Labé, achevé par Maurice Ohana en 1990, recentre l’écoute sur une écriture qui, sans concéder à sa personnalité propre, ne renie pas l’héritage du passé. Toutefois, l’on regrettera l’abord assez anémique des artistes, qui engendre des résolutions parfois fragiles, voire des attaques molles. Aussi, des deux pièces créées ne nous est offerte qu’une approche restreinte (reste à imaginer ce qu’on en pourrait faire). Les Chansons de la Macédonienne Evdokija Danajloska se révèlent proches du texte inspirateur, parfois jusqu’à l’illustration, usant volontiers d’effets d’accentuation et de motifs obstinés. Quant à Les mots de Marco-Antonio Pérez-Ramirez, d’après trois sonnets de Louise Labé, ouvert par un cri à situer aux origines du désir, on devine qu’ils demandent un tout autre engagement pour livrer le lyrisme des aimantations qu’il évoque.

BB