Chroniques

par bertrand bolognesi

Bartókiades I-3
Pierre Fouchenneret et Igor Tchetuev

Opéra de Dijon / Auditorium
- 20 novembre 2011
le jeune violoniste Pierre Fouchenneret joue Bartók à Dijon
© dr

Tout a une fin, même les meilleures choses. Ainsi de ces Bartókiades de l’Opéra de Dijon dont le premier volet s’achève cet après-midi [lire nos chroniques du 18 novembre 2011, ainsi que du premier et du second concert d’hier]. Le programme choisi (pour piano solo et pour violon et piano) couvre une période charnière s’étalant de 1911 à 1922, montrant un Bartók à la fois résolument moderne et soucieux d’élever l’héritage populaire hongrois à la musique dite « savante ».

La Sonate pour violon et piano n°2 Sz.76 donne d’emblée le ton, sous l’archet tendre de Pierre Fouchenneret. Le Molto moderato bénéficie d’une souplesse indicible, d’un son moelleux, d’une inflexion presque « amoureuse », pourrait-on dire, toujours infiniment délicate. De même le piano d’Igor Tchetuev se révèle-t-il des plus doux, dans une couleur plutôt debussyste. Saluons également l’inventivité du violoniste qui judicieusement habite ses harmoniques de timbres de bois. La nuance est raffinée, le phrasé d’une élasticité remarquable. L’Allegretto élève un chant gracieusement volubile dont le pianiste soigne méticuleusement l’équilibre, y compris dans un aigu d’une rondeur secrète.

Le musicien ukrainien livre ensuite une lecture élégante et profonde des Huit Improvisations sur des chansons paysannes hongroises Op.20 Sz.74. À l’onctuosité chorale de la première (Molto moderato) réponde un caprice bondissant dont la clarté certaine ne déroge cependant pas au velours du toucher. Le Lento suivant donne envie d’entendre Tchetuev dans l’Opus 1 de Berg et les Préludes de Messiaen. Après un Allegro vertement contrasté, la danse virevolte (n°5), tandis que le Sostenuto (n°6) se fait ursin pour commencer, se civilisant progressivement dans une couleur délicieuse. L’antépénultième improvisation entretient un souvenir rhapsode, tandis que le cycle se termine dans une liesse à laquelle l’artiste offre exactitude et précision.

Il enchaîne la Sonate Sz.80 de 1926, assenée dans un relief qui, d’abord, surprend. Un sens exquis de la dynamique et de la demi-teinte soutient l’exécution du mouvement médian, tandis qu’une énergie sagace s’affirme dans l’Allegro final. Petite parenthèse dans l’excellence de ce concert, l’Allegro barbaro Sz.49 est pris un peu lent, quoiqu’irréprochable, ne prendra décidément pas. En revanche, les Danses populaires roumaines Sz.56 trouvent une expression des plus fines, scrupuleusement fidèle à la lettre comme à l’esprit.

Les Bartókiades ne sont pas finies ; elles reprendront du 15 au 24 janvier 2012, n’oubliez pas !

BB